L’histoire de Sophie-Dorothée : quand le conte de fées vire au cauchemar, partie II

Partie I

C’tait une ben belle étincelle de rébellion de la part de Sophie-Dorothée, mais malheureusement, George-Guillaume tenait mordicus à c’te mariage-là; l’encre était sèche su’l contrat, pis c’tait ça qui était ça.

Pendant des semaines, Sophie-Dorothée essaya de le faire changer d’idée, se chicanant avec lui encore et encore, aussi déterminée qu’une mouche qui pense que si a s’pète le front assez de fois dans l’chassis, a va finir par passer au travers d’la vitre.

Mais tranquillement, la résistance d’la princesse commença à s’échiffer, pis les esclandres firent place au braillage – déchirant, interminable. On était en novembre, en plus, faique c’taient les vrais sanglots longs de l’automne.

Éléonore capotait : depuis l’temps qu’a l’était avec Georges-Guillaume, c’tait la première fois qu’y faisait d’quoi de carrément contre c’qu’a voulait.

En femme de son époque, par’zempe, Éléonore savait qu’a pouvait pas yinque ramasser sa sacoche pis ses clés d’char pis partir dans’nuitte avec sa p’tite fille pour la sauver d’un mariage épouvantable – ça aurait juste empiré les affaires. A pouvait yinque piler su toutes ses instincts pis essayer de calmer pis de rassurer Sophie-Dorothée, même si le cœur y était pas.

— Mais Georges-Louis est horri-hii-hiiiiible!
— Ben, tu sais pas? Quand vous allez être mariés, tu vas apprendre à mieux l’connaître, pis peut-être que tu vas y découvrir des belles qualités?
— Mais m’maaaaaaan! Toi pis papa, vous vous êtes mariés parce que vous étiez en amour! Pourquoi, moi ch’peux paaa-haa-haaaas?
— Ah, mais nous-autres, c’tait pas pareil, ma chouette…

Pis l’jour des noces finit par arriver. Ch’t’un peu mêlée, parce que ch’trouve plein de versions, mais chose certaine, c’tait fin novembre 1682, pis y faisait frette, gris pis déprimant, comme chez nous dins mêmes temps.

Le marquis qui arprésentait Louis XIV à la cour de Celle, lui, y dit que l’mariage se passa quasiment en cachette, après l’souper, avec juste les époux, leux parents pis une couple d’autres proches.

Y’en a d’autres qui disent qu’y a eu des noces dans l’sens du monde, avec un party pis des centaines d’invités.

Dans tou’és cas, Sophie-Dorothée était malheureuse à pu finir. A l’avait les yeux rouges pis la p’tite baboune tremblotante, mais a d’vait quand même sourire pis faire semblant d’être contente quand quequ’un de ben intentionné arrivait pour la féliciter.

Georges-Louis avait déjà l’air de trouver sa femme gossante. Y l’avait à son bras pis y’a r’gardait à peine. Y’était tanné de ses simagrées; franchement, qu’a prenne su elle pis qu’a l’arrête de brailler. C’tait sûrement pas sa mère la duchesse Sophie qui aurait montré une face de même en public. C’qu’y fallait pas faire pour 100 000 écus par année.

Lui, y’avait 22 ans, faique pensez-y : c’tait comme si votre fille qui est en secondaire 5, qui est toute pimpante pis qui a plein d’amis, s’artrouvait tout d’un coup à marier le garçon à votre sœur qui a jamais fini son cégep mais qui est réserviste dans l’armée, qui passe toute son temps à s’entraîner ou à aller dans des forums louches su Internet, qui a zéro sens de l’humour pis qui boutonne toujours son polo jusqu’en haut.

Queques semaines plus tard, notre p’tite Sophie-D partit pour Hanovre avec Georges-Louis pis sa belle-famille.

A trouva la transition toffe en maudit.

Chez elle, tout l’monde l’aimait, pis le château à ses parents avait un peu une ambiance de chalet familial de luxe – c’tait pas l’genre de place où c’qu’on s’enfargeait dins fleurs du tapis.

À Hanovre, Sophie la péteuse avait instauré un décorum quasi-militaire, pis tout l’monde se t’nait les fesses serrées.

Donc, c’tait quasiment impossible que Sophie-Dorothée fasse pas des p’tites erreurs de temps en temps : dire un mot plutôt qu’un autre, s’asseoir une fraction de seconde avant l’temps, aller au-devant de quequ’un alors que c’est le quequ’un qui devait aller au-devant d’elle, c’t’à-dire toute des p’tites affaires qui passeraient 100 pieds par-dessus la tête à vous pis moé.

Pis quand ça finit par arriver, sa belle-mère laissa pas le moindre p’tit accroc passer, pis a mit pas des gants blancs :

« Ouin, on voit ben comment ta mère t’a élevée! »

Pendant c’te temps-là, Georges-Louis faisait comme si a l’existait pas; y lui parlait pas, y la défendait pas, y l’aidait pas à se sentir chez elle. Y faisait juste la r’joindre dans l’noir pas de préliminaires pour accomplir son d’voir conjugal, pis c’tait ça.

D’ailleurs, queques mois après les noces, Sophie-Dorothée tomba enceinte, pis a mit au monde un p’tit gars qui fut appelé Georges-Auguste (c’qui confirme mes soupçons que dans c’te famille-là, y’avait un sac avec des tits-papiers qui avaient quatre-cinq noms écrits dessus, pis on faisait yinque en piger un ou deux quand v’nait le temps de nommer un nouveau bebé).

Pis trois ans et demi plus tard, a l’eut une fille, appelée Sophie-Dorothée elle avec (qu’est-cé que j’vous disais?).

Dans c’tes temps-là, une nouvelle femme de prince ou de roi était toujours dans une position un peu branlante jusqu’à ce qu’a produise un héritier doué de zouiz pis un autre de r’change, au cas.

À c’t’heure que c’tait plus ou moins faite, Sophie-D aurait pu s’attendre à ce que son mari pis sa belle-mère soient un peu plus fins avec elle pis que sa vie à Hanovre soit pu juste un maudit purgatoire, mais ça se passa pas d’même.

Sophie–belle-mère continua d’la traiter comme d’la marde. Pire encore, a y’avait pratiquement enlevé ses enfants pour s’occuper d’leu z’éducation.

Georges-Louis, se sentant libéré de l’obligation de partager son litte avec elle, se mit à courir allègrement la galipote pis l’abandonna complètement.

Rendu là, a vivait pas mal tu’seule; y’avait pu yinque ses dames d’honneur qui se t’naient avec, plus par obligation qu’autre chose, pis des fois ses parents qui v’naient y rendre visite.

Tout l’monde à la cour, à part peut-être son beau-père qui l’avait emmenée faire un beau voyage en Italie entre ses deux grossesses, semblait se crisser d’elle par exprès ou y faire des gros yeux. A l’avait l’impression que, peu importe c’qu’a faisait, à réussissait jamais à s’faire aimer pis a comprenait pas pourquoi.

Le sort avait l’air de s’archarner su elle. Mais, ça se pourrait ben que l’sort ait eu d’l’aide…

Faut que j’vous dise : en arrivant à Hanovre, Sophie-D avait rapidement découvert que la vraie boss des bécosses d’la cour, c’tait pas sa belle-mère – c’était la maîtresse à son beau-père, la redoutable comtesse Élizabeth von Platen.

C’t’un peu surprenant, j’avoue; mais même si Sophie–belle-mère était ben stiquée su l’étiquette, contrairement à Sophie-Dorothée, a se sacrait pas mal de l’infidélité à son mari. Elle qui aimait la science, a considérait le couraillage à Ernest-Auguste comme un fait d’la nature, au même titre que l’soleil qui s’lève, ou bedon que la gravité, fraîchement découverte par Isaac Newton en 1687. A l’était comme au-dessus de toute ça. Les poulettes en dessous d’elle pouvaient ben se picosser comme y voulaient, a les argardait même pas.

Ça laissait le champ libre à la comtesse de Platen, qui s’adonnait à être aussi la femme du premier ministre. Elle-même, c’tait un pétard, le genre de beauté sensuelle qui fait monter la sève dins érables d’un seul argard, pis a t’nait toute la cour par les gosses en mettant ses sœurs, ses cousines pis ses amies dins bras de toutes les monsieurs importants.

Autrement dit, c’tait une vraie araignée qui tissait sa toile pour avoir un maximum de pouvoir.

Là, avant d’continuer, faut que j’vous l’dise : on a pas de preuve noir su blanc du rôle que la Platen a joué dans toutes les affaires que j’m’en vas vous raconter. Mais tsé, ça fait des siècles que l’monde essayent de savoir c’qui s’est vraiment passé, pis même les plus frileux ont pas le choix d’admettre qu’a l’est pas nette.

À part de t’ça, m’as vous l’dire, l’histoire est ben meilleure avec comtesse que sans comtesse. Faique, prenez toute c’qui a rapport à elle avec un ti-grain d’sel, pis toute va ben aller.

Ce dont on est pas mal sûrs, entécas, c’est que par en arrière, la comtesse de Platen avait insisté ben gros pour que Georges-Louis marie Sophie-Dorothée; a l’avait vu ça comme une passe de cash. Peut-être même qu’Ernest-Auguste aurait jamais faite de move pour conclure le contrat de mariage si a y’avait pas r’battu les oreilles avec les asties de 100 000 écus par année.

Là où toute avait pris l’clos, c’est quand la comtesse s’est rendu compte que celle qu’a l’avait pris pour une grosse colonne mal arrangée – j’vous rappelle encore une fois toute le ark! que les origines à Sophie-Dorothée suscitait chez les têtes couronnées pis leu z’entourage – était en faite une jeune fille magnifique pis pétillante, avec des beaux grands yeux bruns, tirée à quatre épingles pis à la dernière mode, avec d’la culture, du talent pour la musique pis l’humour et l’sens d’la répartie ben français à sa mère.

Bref, a l’avait toute c’qu’y fallait pour y voler sa place.

Sans doute que dès qu’a l’avait vue, la comtesse avait dû se dire :

« M’as te tuer ça dans l’œuf. »

D’abord, la Platen se mit à surveiller Sophie-Dorothée en guettant la moindre p’tite gaffe, le moindre p’tit mot de travers.

Pis l’pire, c’est que Sophie-Dorothée y donnait du matériel : le cœur tout aigri à cause d’la façon dont a l’était traitée, la princesse se plaignait tout haut pis a s’défoulait en se servant de sa langue ben pendue pour parler dans le dos de sa belle-famille pis des autres membres d’la cour.

Ça y faisait du bien de pondre les bitcheries les plus raffinées; si a l’avait eu le pouvoir d’la Platen, un mot de sa part aurait suffi pour ruiner la vie sociale de quequ’un pour toujours. Mais là, a l’était isolée, faique a jouait avec le feu : y’avait toujours un astie d’écornifleux pour écouter toute c’qu’a disait pis aller bavasser ça à la comtesse, qui s’faisait un plaisir de toute arvirer contre elle.

Un jour que Sophie-D se lamentait à Mlle de Knesebeck, une de ses dames d’honneur qui était pas mal sa seule vraie amie, a lâcha de quoi du genre :

« Ah! J’aimerais don être une marquise de France à’place d’une princesse de Brunswick-Hanovre! Ch’rais ben moins malheureuse! »

On pourrait s’dire qu’y a rien là vite de même, mais dans c’tes années-là, le Saint-Empire (dont Hanovre faisait partie) était en guerre contre la France. Y’en fallut pas plus pour que, dans toute la cour, on s’mette à dire :

« La princesse sympathise avec l’ennemiiiiiiii! »

Aussi, pour être ben sûre que Georges-Louis arpense pu jamais à s’occuper de sa femme, la comtesse y’avait poussé dins bras une p’tite poulette fraîchement arrivée à’cour qui répondait au doux nom d’Ermengarde Mélusine von Schulembourg. La fille était trop simple pis pas assez dégourdie pour avoir des ambitions par elle-même, mais la Platen avait eu besoin d’à peine une couple de semaines pour y monter la tête, y’apprendre toutes ses trucs de séduction pis la rendre complètement loyale.

Après ça, y’avait yinque fallu attendre que Georges-Louis arvienne d’une campagne militaire en Hongrie, pis hop! Y’était tombé drette dans l’piège. À partir de c’te moment-là, Mélusine s’tait mise à l’accompagner aux bals, aux partys de chasse royale, à des concerts de musique pis à toutes les autres places le fun où Sophie-Dorothée aurait dû aller avec son mari – pas elle!

Là, c’tait ben d’valeur, mais la princesse était pas comme sa mère, qui présentait la joue gauche quand on la fessait su’a joue droite pis qui finissait toujours par avoir tout le monde à l’usure.

Faique quand a s’rendit compte de toute ça, la pauvre fille péta sa coche solide à Georges-Louis, pis pas yinque une fois. Quand ça arrivait, a criait tellement fort qu’on l’entendait d’un boutte à l’autre du palais :

« SIMONAC GEORGES-LOUIS, TU FAIS-TU EXPRÈS POUR ME FAIRE HONTE, OU BEDON T’ES TROP CAVE POUR TE RENDRE COMPTE QUE TOUT L’MONDE TE VOIT COURAILLER PIS RIT D’MOÉ PARCE QUE CHUS COCUE? »

J’la comprends, ben sûr – j’aurais probablement faite pareil, avec extra bacon! – mais mettons que c’tait rien pour détendre l’atmosphère.

C’en arriva à un point où même Sophie pis Ernest-Auguste dirent à Georges-Louis de faire plus attention avec ses maîtresses :

« Heille, garde-toé don une p’tite gêne, fils! Si ça continue d’même, ta femme pourrait ben aller s’plaindre à son père, pis on aura pas les 100 000 écus par année! »

Du bon monde qui avaient les priorités à’bonne place, hein?

Après ça, Georges-Louis fit un effort pour être plus discret, mais y resta abonné à la couchette à Mélusine.

Sophie-Dorothée, elle, était malheureuse comme les pierres pis a voyait pu l’boutte.

C’est à c’te moment-là qu’arsoudit à la cour de Hanovre une nouvelle face – une face qui, on va l’voir, était autant une lueur d’espoir pour la princesse que l’étincelle qui allait toute faire péter.


Sources:

Charles-Prosper-Maurice Horric de Beaucaire, Une mésalliance dans la maison de Brunswick, 1665-1725: Éléonore Desmier d’Olbreuze, duchesse de Zell, 1884.
Henri Blaze de Bury, « Le Dernier des Koenigsmark », Revue des Deux Mondes, 1853.

« Tassez-vous que ch’passe! » — L’histoire du RMS Olympic, la grande sœur du Titanic, dans ses propres mots

  Heille salut! Moé c’est Olympic, pis j’étais un navire. Pis toute un, à part de t’ça. 

Bon, ok. Ça se peut que vous ayez jamais entendu parler d’moé. J’vous en veux pas pour ça. Tout l’monde en a yinque pour ma p’tite sœur, Titanic. 

Quand même, ça m’écoeure un peu, tsé : moé, j’ai eu une longue et ÉPIQUE carrière, pis elle, a s’crisse d’un iceberg comme une épaisse à son premier voyage, pis a l’a droit à toutes les honneurs, avec un film, Céline Dion, tou-dou-dou-douuuu, ti-delou-dou-dou-dwiiiiiii pis toute le kit. 

(Ch’t’aime pareil, la sœur.)

Mais là, à soir, c’est moé qui raconte. Pis vous allez capoter. 

Quand chus née, le 20 octobre 1910, au chantier maritime Harland & Wolff de Belfast, j’étais le plusse gros pis le plusse luxueux paquebot océanique au monde. Côté grandeur, je torchais complètement ma plus proche rivale, le Mauretania, pis je bouffais quasiment la moitié moins de charbon. J’étais bourrée d’installations super fancys : en plus des restaurants, des salons pis des salles de lecture, j’avais un gym, une piscine, un terrain de squash, pis même des bains turcs! La grosse vie sale. Checkez-moé l’escalier!  

Contrairement à quequ’un qu’on connaît, j’ai faite mes quatre premiers voyages à New York sans problème. Partout où c’que j’passais, les quais étaient paquetés d’monde qui étaient là pour me voir!  

Mais là, à mon cinquième voyage… Quand chus partie, faisait beau, toute allait ben, pis là, y’a un épais qui m’a foncé dedans. 

J’essayais de sortir du Solent, un passage pas super large entre l’Angleterre pis l’île de Wight. C’est du trouble, passer là : y’a un maudit banc d’sable qui bloque le ch’min, pis faut virailler pour pas s’échouer dessus. 

C’est là qu’est arrivé le HMS Hawke, un croiseur d’l’armée britannique. Y s’en allait dans’même direction qu’moé, mais pour moé y’a pas allumé que j’virais pas s’un dix cennes. Ch’tais l’plus gros navire du monde, tsé! 

Pour faire une histoire courte, y s’est pas assez tassé pis BANG! Y m’a rentré dans l’côté à tribord. 

J’vous rassure tu’suite : parsonne a coulé pis parsonne est mort. 

Mais quand j’ai été armorquée au port, les autres bateaux étaient là : « Cibole, Olympic, qu’est-cé qui t’est arrivé là? »

Pis moé j’répondais : « Ha! Attends de voir l’autre gars! »

Ça, c’est des images de moé pis du Hawke après l’accident.   

Comme vous voyez, moé ch’tais pas si pire. Mais astie, le Hawke, y’avez-vous vu la face? Y’avait l’nez toute effoiré! Ch’tais crampée. 

Ouin, je l’sais que c’est pas fin d’rire du malheur des autres, mais tsé! C’tait un croiseur faite pour détruire les autres bateaux en leux fonçant d’dans! Y m’a yinque faite un p’tit trou pis lui y’était rendu tout plate! 

J’ai passé un p’tit boutte en cale sèche, mais deux mois plus tard, ch’tais arpartie. Pour me réparer, y’ont dû prendre des matériaux pis du monde qui devaient aller au Titanic, faique ça l’a artardé son premier voyage de trois semaines.

Vous connaissez l’histoire : le 15 avril 1912, ma p’tite soeur a coulé comme une roche dans l’océan Atlantique en emmenant 1 500 passagers avec elle par le fond. Ça s’rait-tu arrivé quand même si le Hawke m’avait jamais rentré d’dans? On l’saura jamais. 

Entécas, moé, ch’t’étais pas super loin de d’là, pis mon capitaine – le capitaine Haddock, sans joke – m’a proposée pour embarquer des rescapés, mais y m’ont dit non : ça a d’l’air que ça les aurait traumatisés de s’faire ramasser par un navire pareil comme lui qui v’nait juste de couler. Franchement. Quand tu viens d’avoir la chienne de ta vie dans l’eau frette, tu te sacres ben de quel bateau qui te ramasse. Messemble, entécas. 

Faique j’ai continué tout drette. 

Après la tragédie, mes propriétaires m’ont toute arrangée pour pas que la même affaire m’arrive – y m’ont ajouté des canots de sauvetage, entre autres. Y’ont aussi changé les plans de mon autre p’tite sœur, le Britannic, qui était après être bâtie.

Là, j’ai arpris la mer pis j’ai faite ma job ben peinarde pendant un boutte, mais ça a pas duré longtemps – la Première Guerre mondiale a commencé.  

Y m’ont peinturée en gris laitte pour que ch’soye plus dure à voir, pis pendant une couple de mois, j’ai surtout sarvi à faire travarser des Américains pognés en Europe.

Mais là, les asties d’sous-marins U-Boots allemands ont commencé à faire pas mal de marde. Les bateaux coulaient de tous bords tous côtés. C’tait rendu ben que trop dangereux pour les voyages commerciaux, faique mon boss m’a dit de faire un darnier aller-retour – j’allais être au chômage pour le temps d’la guerre. 

Donc ch’tais là, au quai, à m’pogner les bouées depuis au moins six mois quand j’me suis faite câller par l’armée britannique. Ouais monsieur! Y’avaient besoin d’moé pour transporter des soldats. 

Y’ont défaite mes beaux salons pour péteux d’broue pis y’ont toute changé ça en dortoirs pour les soldats pis en cabines pour les officiers. Avec ça, ch’tais bonne pour transporter 6 000 hommes! Ma bibliothèque est devenue un hôpital de 100 littes. Pis y m’ont mis des CANONS! Yaaaahhh! Heille là on jasait! 

Comme ma p’tite soeur, Britannic, était pas encore finie de construire, ben elle, y l’ont changée en navire-hôpital. A l’était-tu belle, un peu, dans son beau kit blanc de docteur! Ch’tais ben fière d’elle. 

Elle pis moé, on a été envoyées en Méditerranée. Mais là, c’est pas parce que ch’faisais yinque transporter des troupes que ça allait être pépère! 

Drette à mon premier voyage, dans’mer Égée, mon capitaine pis moé on a spotté des survivants d’un bateau français qui v’nait d’être coulé par un U-Boot. On s’est argardés, pis ça a été clair tu’suite : pas question d’passer tout drette sans les ramasser. 

Faique on s’est arrêtés. D’une zone bourrée d’sous-marins allemands. Pis tsé, à ma grosseur, on va l’dire, ch’tais pas toute à faite discrète. Mais au yâble le danger. 

Yinque comme on v’nait d’embarquer toutes les survivants à bord pis d’ardécoller full pine, j’ai vu un astie d’périscope. Mon capitaine m’a dit d’virer ben sec. L’sous-marin m’a tiré une torpille, pis a l’est passée dans l’beurre. Après ça, c’est moé qui a tiré du canon d’ssus; ch’sais pas si je l’ai pogné, mais entécas, on l’a pu arvu du voyage. 

Quand on est arvenus en Angleterre, l’Amirauté était pas contente, pis mon capitaine s’est faite chicaner. C’est clair que si l’sous-marin s’tait pointé juste un ti peu plusse de bonne heure pis m’avait pognée pendant que ch’tais arrêtée, y’aurait pu m’couler avec 6 000 hommes à bord. C’te coup-là, j’ai été pas mal mardeuse.  

Pis la France a donné la médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement à mon capitaine. Faique, dans leux dents. 

Ch’t’artournée plusieurs fois dans’Méditerranée, jusqu’à ce que les Alliés se rendent compte que le front des Dardanelles contre les Turcs était un astie d’chiard qui m’nait nulle part pis évacuent tout l’monde. 

Mais ça m’a pas pris grand temps pour me trouver une autre job. 

À ce moment-là, le Canada a embarqué dans’guerre. Faique, de 1916 à 1919, j’ai charroyé des soldats canadiens jusqu’en Europe, pis à partir de 1917, des soldats américains aussi.

Là, heille, ch’trippais : y m’ont mis encore plusse de canons, pis y m’ont donné une belle nouvelle couche de peinture super fâsheune. Checkez ça!   

Y’appelaient ça le « dazzle » – ça veut dire « éblouissant » en français. Pis ben quins, que ch’tais éblouissante! Astie, si ça avait été yinque de moé, ch’rais restée d’même toute le long de ma carrière. Les lignes pis les couleurs bizarres, c’était pour fourrer les sous-marins ennemis, pour qu’y sachent pas exactement où c’que chus pis où c’que j’m’en vas. 

Au début, l’Canada voulait absolument que ch’soye escortée par un convoi militaire. Mais moé, ch’tais là : Ben voyons donc! J’vas à 22 nœuds, pis leux bateaux vont juste à 12 nœuds. Ma meilleure chance pour éviter les U-Boots, c’tait de clancher le plus vite que ch’pouvais pis au yâble l’escorte. Finalement, j’ai pu faire mes voyages tu’seule. Pas l’temps d’niaiser!

Ch’faisais une travarsée aux trois s’maines, ch’tais toujours en temps, pis j’ai jamais eu d’avarie. Tellement qu’y ont fini par m’appeler « Old Reliable » – autrement dit, l’bon vieux bateau fiab’. Mais ma p’tite sœur, Britannic, a pas été aussi luckée que moé : le 2 novembre 1916, la pauvre chouette a passé s’une mine dans’mer Égée pis a l’a coulé. Des trois sœurs, y restait pu yinque moé.

Le matin du 12 mai 1918, ch’tais dans’Manche – pas la manche de ch’mise, là, mais l’bras d’mer entre la France pis l’Angleterre – quand j’ai spotté d’quoi quand même assez proche à ma proue tribord. Câlisse : c’tait un U-Boot, pis y’était assez proche pour me tirer une torpille!

Mon capitaine a pas pogné les nerfs pantoute. Ben calme, y m’a juste dit : « Olympic! Tourne… C’est beau… »

Là, le p’tit crisse de vlimeux d’sous-marin a essayé de m’passer en d’sour du nez en s’en allant en dedans d’mon virage! Faique mon captaine a dit : « BÂBORD TOUTE! »

J’ai tu’suite compris c’qu’y avait en arrière d’la tête. Faique j’ai viré comme j’ai jamais viré, mis l’gaz au boutte, pis BANG! J’y ai crissé ça dedans! 

Quins mon estie! Y’a même pas eu l’temps d’plonger : j’l’ai harponné, y’a glissé en d’sour de moé, pis mon hélice l’a ouvert comme une canne de bines Clark à midi tapant.  

Pis c’te fois-là, j’me suis pas arrêtée pour ramasser des survivants. 

(Faites-vous en pas, quand même : y’a un destroyer américain qui a r’pêché 31 Allemands qui avaient réussi à sortir d’leu maudit suppositoire des mers.)

Pas longtemps après, la guerre a fini. Après ça, ma job, ça a été de ramener les soldats chez eux. 

Heille, si vous aviez vu l’accueil, vous-autres! Toutes les autres bateaux dans l’port d’Halifax avaient leux drapeaux dins airs pis faisaient crier leu criard, les quais étaient paquetés d’monde qui criaient eux-autres avec; y’avait des orchestres qui jouaient, pis y’avait une grosse bannière écrit : « Bienvenue, Old Reliable ». 

Astie, scusez, là, j’viens les hublots trempes yinque de m’en rappeler! 

Faique là, j’allais être artransformée en paquebot pour péteux d’broue. Comme la guerre m’avais pas mal maganée, ça allait prendre pas mal d’huile de coude. 

Ah heille, pis vous savez pas quoi? Quand y m’ont mis en cale sèche, y se sont rendu compte que j’avais un trou dans mes bas – autrement dit, j’avais mangé une torpille sans m’en aparcevoir. Elle avait pas explosé pis j’l’avais même pas sentie! Allez savoir depuis combien de temps que j’me promenais d’même. 

J’vous l’avais-tu dit que ch’tais mardeuse?

Pour la décennie d’après, ch’t’artournée à mes moutons.  Ça a été des belles années. Ch’tais pas mal populaire : vu que j’étais pareille comme le Titanic – sauf que tsé, c’tait plutôt elle qui était pareille comme moé – l’monde étaient là : « Wouhou, c’est comme être su’l Titanic, mais sans l’mourrage! » 

Heille, pis ch’t’ai eu toutes que des passagers : Marie Curie, Charlie Chaplin, les acteurs Marie Pickford pis Douglas Fairbanks, pis même l’prince de Galles, tsé lui qui a abdiqué pour marier une Américaine divorcée à l’air bête pis qui a fricoté avec Hitler?

Y’a juste en 1924, là, j’arculais en sortant du port de New York pis y’a le Fort St. George, un autre navire de passagers pas mal plus p’tit qu’moé, qui s’en v’nait en malade sans r’garder, pis y m’a foncé dedans, BONG! Y’était tout scrap, pis moé j’ai pu faire ma travarsée comme si de rien n’était. Stie d’sans-génie! 

Après ça, y’a eu la Grande Dépression, pis l’monde se sont mis à voyager pas mal moins. J’avais la moitié d’mes passagers d’avant. En plus, ma compagnie, la White Star, a fusionné avec sa grosse rivale, la Cunard. La Cunard était ben pressée de lancer son nouveau paquebot, le Queen Mary. Faique y m’ont tassée. J’vois pas d’autre raison.

Je v’nais yinque d’être rénovée pis mes moteurs viraient mieux qu’jamais. Pourtant, après un dernier aller-r’tour en avril 1935, y m’ont mis à’retraite, pis y m’ont vendue pour le fer au premier du bord. Mon beau foyer en marbre pis mes meubles, mes portes pis mes boiseries ont été mis aux enchères. 

Juste de même, j’existais pu. 

Dans ma carrière, j’avais fait 257 aller-retours su l’Atlantique, transporté 430 000 passagers, voyagé 1,8 millions d’milles, faite la guerre pis foncé dans plein d’affaires, itou. J’argrette arien. Pis là, j’espère qu’après aujourd’hui, m’as être jusse un ti peu moins oubliée. 


Source : Mark Chirnside, RMS Olympic, Titanic’s Sister, 2nd Edition, 2015.

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Pour faire comme eux-autres et lire les articles avant tout le monde pis même profiter de contenu extra rempli de détails croustillants, c’est par ici!

La Guerre des Deux-Roses, partie VI : Les deux p’tits princes dans’tour

Avant la Guerre des Deux-Roses, partie I
Avant la Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie I
La Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie III
La Guerre des Deux-Roses, partie IV
La Guerre des Deux-Roses, partie V

Arvenons du bord d’Édouard IV pis de sa reine Élizabeth Woodville. 

Sept ans après la bataille de Tewkesbury, Édouard était ben peinard su’l trône d’Angleterre depuis assez longtemps pour s’être faite une belle grosse empreinte de fesses. 

Mais ça veut pas dire que toute allait ben Madame la Marquise. 

« Georges, ciboire, là j’en ai mon câlisse de voyage de tes niaiseries pis de tes crises de bacon. C’t’assez. Ch’te condamne à mort. »

Georges, duc de Clarence, le frère York du milieu entre Édouard pis Richard, duc de Gloucester, avait toujours été un bébé gâté pas capable d’attendre son tour. Vous vous rappelez, là, quand y’avait voulu être roi à la place d’Édouard pis qu’y avait embarqué contre lui avec Warwick?

Par après, comme y’était marié avec Isabelle, la fille à Warwick, pis qu’y était pas capable d’attendre que sa belle-mère pète au frette pour ramasser l’héritage, ben y l’avait faite déclarer LÉGALEMENT MORTE. Le genre de passe qui fait un frette au réveillon. 

Après ça, Isabelle est morte, faique Georges a voulu s’armarier avec Marie, la jeune duchesse de Bourgogne – pis l’héritière la plus riche de toute l’Europe –, mais Édouard y dit non. Finalement, c’tait aussi ben, parce que Marie est morte quatre ans plus tard quand son ch’fal s’est enfargé, l’a faite arvoler d’une calvette, y’est tombé dessus pis y’a cassé le dos.

Mais bon. Georges, c’tait pas un devin, pis su’l coup, y’était en tabarnak. Édouard avait des raisons politiques d’y dire non, mais Georges le prit personnel. Y quitta la cour fâché noir pis s’en alla dans ses domaines, où y’arcommença à manigancer contre Édouard pis sa famille. 

La reine Élizabeth était ben stressée :

—Édouard… Nos gars sont encore trop p’tits, pis si y t’arrivait d’quoi… On s’ra jamais en sécurité tant que Georges va être là à te jouer dans l’dos!
— Je l’sais, Bebé… Va falloir que ch’fasse de quoi. 

Selon la légende, Georges a pu choisir comment y’allait être exécuté, pis y fut nèyé dans un tonneau d’vin. 

Après ça, Édouard pis Élizabeth purent dormir su leux deux oreilles. Y restait yinque Richard, le plus jeune des frères York, pis y’avait toujours été ben loyal.  

Sauf que l’malheur était jamais ben loin, caché en arrière des tapisseries à écornifler pis à s’frotter les mains en pensant aux coups d’cochon qu’y allait faire. 

Cinq ans plus tard, Édouard mourut à l’âge de 40 ans. On sait pas trop de quoi, mais on pense que c’tait une pneumonie. C’est sûr que ces dernières années, y s’tait lâché lousse pas mal : trop de femmes, trop bouffe, trop de boisson. Y’avait engraissé sans bon sens – tsé, y’avait pris l’habitude de s’faire vomir en plein banquet, histoire de s’faire d’la place pour manger plus. 

Peu importe pourquoi y’est mort, là, Édouard, son fils de 12 ans, allait y succéder. 

C’tait un moment délicat, comme quand Mémère Poêle sépare ses blancs d’œufs pour faire d’la m’ringue. La couronne allait-tu passer su’a tête du p’tit sans qu’y aye de trouble?

Drette tu’suite, Élizabeth écrivit à son frère à elle, Antoine Woodville, comte Rivers, qui était le tuteur au p’tit Édouard. A y dit d’amener Édouard à Londres au plus sacrant, gardé par 2 000 hommes. 

Pendant c’temps-là, Richard, duc de Gloucester, le mononcle du p’tit Édouard, était su ses terres, dans l’nord de l’Angleterre. Quand y’apprit que son frére était rendu six pieds sous terre, y’écrit à Élizabeth : 

« Chère Belle-Sœur, 

J’viens d’apprendre la nouvelle. Toutes mes sympathies. Mon cœur saigne avec toé.
Soye assurée, Madame, que j’vais être super loyal à ton p’tit gars, not’nouveau roi. Y’aura pas plusse loyal que moé. Genre, j’me crisserais d’un trou d’bouette pour qu’y puisse traverser sans salir ses chouclaques. 

Veuille agréer, Élizabeth, mes sentiments les plusse graissés de larmes.

                                                                                                                             Richard »

Après ça, y’écrit au frére à Élizabeth : 

« Ti-Toine, mon chum, 

J’ai su qu’t’allais escorter le p’tit jusqu’à Londres. C’tu dirais de t’ça si on s’rencontrait, genre, dans l’boutte de Northampton, pis qu’on faisait l’reste d’la route ensemble? On va t’escorter ça, c’te p’tit roi-là! 

Bien à toé, 

                                                                                                                            Richard »

Y’était-tu don d’adon, Mononc’Richard! 

Faique Richard, Antoine pis Richard Grey, un des deux gars qu’Élizabeth avait eus avec son premier mari, s’rencontrèrent à Northampton. Le soir, y firent le party ensemble avec le duc de Buckingham, pis toute allait ben. 

Sauf que, drette le lendemain, Richard fit arrêter l’frére pis l’fils à Élizabeth sous prétexte que… En faite, y se bâdra même pas avec un prétexte. Richard avait peur que les Woodville, la famille à Élizabeth, prennent le contrôle du royaume en passant par le p’tit Édouard, qui avait été élevé par eux-autres. Pour éviter de se faire tasser du pouvoir, y fit exécuter Antoine pis Richard-le-fils-à Élizabeth sans procès pis partit pour Londres avec le mini roi qui capotait ben raide. 

Quand toute ça arriva aux oreilles à Élizabeth, a vit arriver la marde à 100 milles à l’heure. Tu’suite, a reprit son vieux réflexe pis clancha se réfugier à l’abbaye de Westminster avec son deuxième gars – un autre Richard, bazouelle! – pis ses cinq filles, Élizabeth, Cécile, Anne, Catherine pis Brigitte. 

Quand Richard arriva à Londres avec le p’tit Édouard, y’avait toutes les apparences d’un bon mononcle qui faisait yinque veiller sur les intérêts de son n’veu. Y le traitait avec toutes les égards qui y’étaient dûs en tant que roi, pis y se fit nommer lord protecteur par le conseil royal. Y r’mit le couronnement, prévu pour le 4 mai, au 22 juin, mais autrement, toute était beau pis toute se passait normalement. 

Sauf que, pas longtemps après, Richard-le-mononcle fit une autre passe croche : y fit arrêter Lord Hastings – qui était pourtant un allié pur et dur des York depuis l’début – pis l’fit exécuter sans procès dans’cour en arrière, entre deux chaises de patio.

Ça, c’tait louche en maudit.

Richard l’accusait d’avoir comploté contre lui avec Élizabeth, mais ça avait tellement pas d’sens que tout l’monde à l’époque étaient comme : 

« Heille, Ritch, tu nous prends-tu pour des valises? » 

Hastings avait jamais aimé Élizabeth, faique ça aurait été surprenant qui s’mette à grenouiller avec, mais y’avait toujours été deux pouces en arrière d’Édouard-père avec un gros doigt en styrofoam écrit « No 1 » dessus. La seule raison que Richard aurait eu de le faire exécuter, c’est qu’y savait qu’y était fidèle jusqu’au boutte du gros orteil à Édouard-fils, pis qu’y était capable de ramasser une grosse armée su ses terres des Midlands si y se brassait du trouble… Mettons… Mettons que Richard décidait de tasser le p’tit pour prendre sa place. J’dis ça, j’dis rien, mais clairement, Richard était après placer ses pions. 

Après ça, Richard-le-mononcle envoya l’archevêque de Canterbury pour essayer d’convaincre Élizabeth d’y donner Richard-son-neveu :

— C’est pour sa PROTECTION, Madame. Soyez don raisonnable.
— Non.
— Tsé, vot’fils, y peut pas demander l’asile dans une église, y’a même pas commis d’crime!
— Pis? Y’est avec moé, pis c’est ça. J’vois pas pourquoi on pourrait pas demander la protection de l’Église quand ça brasse de même pis qu’on sait pas c’qui va nous arriver!
— Mais là, pensez un peu à Édouard, y s’ennuie de son p’tit frère! Y’a pu parsonne pour jouer!
— Ce problème-là, c’est pas dur à régler : ardonnez-moé Édouard, pis y vont être ensemble, franchement!
— Madame, j’comprends pas pourquoi vous êtes prime de même. Le lord protecteur veut juste…
— Votre lord protecteur, y peut ben manger d’la m—
— MADAME! Vous capotez, là, pis vous voyez du danger partout. Là, vous allez vous calmer les nerfs pis m’faire confiance : j’vas m’assurer personnellement qu’y arrive rien au p’tit. J’essaye de vous aider, là, pis si vous voulez pas être raisonnable, ben ça va être la dernière fois!

Élizabeth se tourna d’bord pis se mit à réfléchir. A savait ben que si Richard-le-mononcle voulait prendre le p’tit par la force, y’avait rien pour l’empêcher de l’faire. Les larmes aux yeux, a laissa Richard-son-fils, qui avait à peine neuf ans, aller avec l’archevêque. Mais avant que le bonhomme parte, a put pas s’empêcher d’y lâcher une dernière craque : 

« Vous dites que j’grimpe dins rideaux pour rien, mais ben vite, vous allez voir que c’est vous-autres qui dormez au gaz! »

Six jours après, Ralph Shaa, un frère franciscain, fit un sermon dans’cour d’la cathédrale Saint-Paul, à Londres. Là, y sortit un scandale digne d’Écho-Vedettes : le mariage entre le roi Édouard pis la reine Élizabeth était pas valide, parce qu’avant de la rencontrer, Édouard avait promis à une certaine Éléonore Butler de la marier, probablement yinque pour forniquer avec. Tant qu’à lui, c’te promesse-là était aussi bonne qu’un mariage en avant d’un curé, faique Édouard avait commis l’adultère avec Élizabeth, pis toutes leux enfants étaient des bâtards. 

Ça, probablement que Georges, duc de Clarence, le savait, pis y menaçait de s’ouvrir la trappe; c’est peut-être pour ça qu’Édouard avait été pas mal pressé d’le faire exécuter.

Ça prenait pas la tête à Papineau pour comprendre où c’que ça s’en allait, toute ça : si les flos à Édouard étaient des bâtards, ben l’héritier légitime du trône, c’tait Mononc’Richard. 

La semaine d’après, le duc de Buckingham fit un discours en avant des grands seigneurs du royaume, qui finit par : 

« Faique, on déshérite-tu les deux flos pis on invite-tu Richard à devenir roi? »

Les autres nobles, sachant c’qui était arrivé à Lord Hastings, avaient pas pantoute envie de mettre leux gosses su’a table pour le p’tit Édouard. Y prirent toute leu trou pis firent exactement c’que Buckingham avait d’mandé. 

C’te faux-cul d’Richard se fit pas trop prier : 

« Moi? Roi? Honn, voyons don, c’est trop, là, j’le mérite pas, vous m’gênez, là! Mais bon, si vous pensez que j’frais un bon roi, chus qui pour vous contredire? Vous insistez tellement, vous m’donnez pas l’choix d’dire oui! » 

Faique, trois mois après la mort d’Édouard, l’plus jeune de ses fréres était couronné sous l’nom de Richard III à l’abbaye de Westminster. 

Élizabeth était juste à côté, dans’maison de l’abbé, pis a pouvait entendre les acclamations pis les cris d’joie. Ça y prenait toute pour pas crisser une table à terre pis casser d’la vaisselle. Tsé, du jour au lendemain, a l’avait pardu son mari, sa couronne, sa sécurité, son frére, son fils, pis…

Pis ses deux p’tits gars, Édouard pis Richard, ben… C’est ben d’valeur, mais on sait juste pas c’qui leux est arrivé. Y’avaient été mis dans la tour de Londres, pis au début, on les voyait jouer dans’cour. Après un boutte, y’ont arrêté de sortir, mais on les voyait quand même par la f’nêtre de leu chambre de temps en temps. Pis un m’ment’né, ben… Y’étaient juste pu là. 

Dans l’temps, tout l’monde disaient qu’y avaient aucune idée de comment y’avaient disparu, Richard III l’premier : 

« Hein, sont pu là? Tu parles, toé, pardre deux p’tits gars dans’tour de Londres! Faut l’faire! C’est-tu bizarre! »

Pis c’est quasiment impossible qu’Élizabeth aye jamais su c’qu’y était advenu de ses gars. Y’en a qui disent qu’a faisait semblant de pas savoir, parce qu’a l’avait faite un deal avec Richard-le-mononcle pour les cacher à queque’part. 

Mais tsé, c’est ben possible aussi que Richard III les aye faite tuer. Après toute, c’tait la meilleure façon d’être sûr qu’y puissent pu y nuire.  On l’saura probablement juste jamais. 

L’temps passait, pis Élizabeth était toujours pognée dans son sanctuaire. A savait pu quoi faire : toutes ses cartes avaient été jouées pour rien, pis l’chien de sa famille avait l’air pas mal mort. Sauf qu’un jour, son docteur, Lewis de Caerleon, vint la voir pour un examen d’routine, rien d’excitant. Jamais qu’Élizabeth se serait attendue à c’qui y dise de quoi qui allait toute changer :  

« Madame, aujourd’hui, j’viens avec un message de mon autre patiente, Madame Marguerite Beaufort. A l’a un deal à vous proposer. »  

La suite icitte!


Sources : Desmond Seward, The Demon’s Brood : The Plantagenêt Dynasty that Forged the English Nation, 2014.
Philippa Gregory et David Baldwin, The Women of the Cousin’s War, 2011.

Un GROS merci à ceux qui m’encouragent sur Patreon : Christine L., David P., Chrestien L., Daphné B., Herve L., Valérie C., Eve Lyne M., Serge O., Audrey A. et Mélanie L.

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La Guerre des Deux-Roses, partie V – Marguerite Beaufort : mère, survivante pis redoutable grenouilleuse

Avant la Guerre des Deux-Roses, partie I
Avant la Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie I
La Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie III
La Guerre des Deux-Roses, partie IV

Bon. À c’t’heure que vous êtes greyés de votre ti café Chemineaud, on va artourner en arrière un p’tit peu. 

Depuis l’début que j’vous achale avec les Beaufort, que j’appelle les nobles « Sélection Mérite ». Là, y vont devenir BEN IMPORTANTS. 

J’vous rappelle qu’Henri VI, lui, c’tait un descendant de Jean de Gand, l’frére au roi Édouard III, pis de sa femme Blanche de Lancaster. Les Beaufort, eux-autres, y descendaient aussi de Mononc’Jean, mais d’un autre litte, lui à sa maîtresse Katherine Swynford. Autrement dit, c’taient une gang de bâtards jusqu’à ce que Mononc’Jean s’armarie avec Katherine pis que le pape déclare toutes leux flos comme étant légitimes. 

Comme j’vous ai dit, Édouard d’York avait zigouillé pas mal toute c’qui restait de prétendants au trône du bord des Lancastriens – entécas, dans’lignée directe de pére en fils. 

Faique là, j’vous présente Marguerite Beaufort. Elle, c’tait la p’tite-fille à Jean Beaufort, le plus vieux des enfants à Mononc’Jean pis à Katherine. Son pére, c’tait un autre Jean Beaufort, premier duc de Somerset, mais pas un de ceux-là dont j’vous ai déjà parlé. Eux-autres, c’taient les cousins à Marguerite. Marguerite avait yinque un an quand y’est mort, pis a l’était sa seule héritière.

Not’histoire commence dans’grisaille détrempée du fin fond du pays d’Galles, où Marguerite s’inquiétait pour son mari, Edmond Tudor. Y s’tait faite capturer par le duc d’York, l’pére à Édouard IV, en s’battant pour les Lancastriens. Pis aux dernières nouvelles, y filait pas ben pantoute. 

Pis quand enfin y’eut du nouveau, c’est les pires peurs à Marguerite qui furent confirmées : Edmond était mort d’la peste bubonique pendant son emprisonnement. 

« Ah mon doux Jésus! C’pas vrai! Seigneur aye pitié d’moé! »

Devenir veuve en temps de guerre, c’tait déjà plate en maudit. Mais pour Marguerite, c’tait comme pire. C’est parce qu’y a une affaire que j’vous ai pas dite : Marguerite, c’était une floune de 13 ans. A s’tait mariée à 12 ans avec Edmond Tudor qui n’avait 24. Pis a l’était enceinte de 7 mois.

Je l’sais, c’que vous pensez : ark. Moé’ssi, la pédophilie, ça m’lève le cœur. Mais j’vous rassure – ça passait pas ben ben mieux dans l’temps :

« Franchement, messemble que l’minimum c’est d’attendre que ta femme aye 14 ans avant d’coucher avec! »

Ah, pis y’a une autre affaire que j’vous ai pas dite : Edmond Tudor, c’tait l’frére utérin à Henri VI. 

Depuis l’temps que ch’t’assis su c’te punch-là en attendant d’vous l’dire, je l’ai quasiment d’imprimé dans’fesse!  

J’vous explique : quand Catherine de Valois, la mére à Henri VI, est devenue veuve, a l’était encore une belle jeune princesse qui avait pas pantoute envie d’se bâdrer avec la politique plate d’la cour. Faique a l’était juste partie s’épivarder semi-secrètement avec Owen Tudor, un beau chevalier gallois ténébreux. Edmond, c’tait l’plus vieux de leux flos. Pis comme Henri VI avait voulu un bon parti pour son demi-frére, c’tait lui qui avait arrangé l’mariage avec Marguerite. 

Fast forward, pis là, pu d’mari, Marguerite Beaufort était tu’seule, loin de sa famille, vulnérable pis pas loin d’accoucher.

Y’était trop tard dans sa grossesse pour qu’a s’en retourne chez sa mére; dans son état, le voyage aurait été ben que trop roffe. De toutes les choix qu’a l’avait, y’en avait yinque un qui avait d’l’allure : aller chez son beauf, Jasper, l’frére à son mari mort, pour avoir sa protection.

Là-bas, Marguerite dut accoucher pas de famille pis pas d’amies pour y flatter les ch’feux pis l’encourager. Pis ce fut épouvantable.

Crisse, la pauvre était à peine femme pis tellement p’tite que Jean Fischer, son confesseur, a écrit plus tard : « C’tait quasiment un miracle qu’un bebé aye pu sortir d’une p’tite crotte de fille de même ».

Malgré toute, Marguerite survécut pis l’bebé aussi : a l’appela Henri – Henri Tudor.

Ça serait son seul flo : faut croire que son accouchement difficile y’avait scrappé l’appareil de femme. Pis c’te moron d’Edmond Tudor, toute pressé qu’y était de consommer le mariage pour mettre la patte sur sa fortune pis d’la mettre enceinte pour avoir un héritier, l’avait traumatisée pis gâché pour elle toute c’qu’y pouvait y’avoir de beau dans la couchette, pour le reste de sa vie.

Pareil. Marguerite était convaincue que l’Seigneur y réservait des grandes affaires, à elle pis à son bebé. Faique aussitôt relevée de son accouchement, a pensait déjà à la suite des choses :

« Bon. Ch’frai pas grand-chose à veuver tu’seule dans mon coin : ça va m’prendre un nouveau mari au plus crisse. Pis c’te fois-là, Seigneur du Bon Dieu, y’en a pas un qui va choisir pour moé! »

Faique, escortée par son beauf, Marguerite partit avec son bebé de 2 mois pour aller trouver l’duc de Buckingham. Tu’seule en son propre nom, a négocia avec le bonhomme pour marier l’plus jeune de ses deux gars, Henri Stafford.

Les noces eurent lieu un an plus tard. 

Marguerite avait eu c’qu’a voulait : la protection de son puissant beau-pére, une place drette au milieu des intrigues d’la cour, pis les moyens de défendre ses intérêts pis ceux à bebé Henri. Sauf que là, ça, ça se passait en même temps que toute le reste; pas longtemps après les noces, y’eut la bataille de Northampton – tsé, là, quand Henri avait été capturé par Warwick, pis quand York pére pensait s’faire couronner pis avait créé un malaise à la place. Pis comme vous l’savez, les Yorkistes ont fini par gagner à Towton.

Ça laissait Marguerite pis son mari du mauvais bord d’la clôture. Mais elle, a se bâdrait pas trop avec les allégeances; y’avait juste son p’tit gars qui comptait.

« Bon. Là, mon mari, je l’sais pas quelles sortes courbettes pis d’chansons pis d’belles façons que ça va prendre, mais tu vas aller voir le nouveau roi Édouard pis tu vas dire qu’on s’excuse d’avoir été du bord à Henri VI. Sinon, y pourrait aussi ben saisir mon argent pis mes domaines! »

Faique le bonasse Henri Stafford s’en alla à Londres, où y réussit à avoir un pardon officiel pour lui pis Marguerite. Sauf que là, Édouard prit une décision que Marguerite arçut comme un coup d’poing dans l’ventre : son p’tit Henri, rendu à 4 ans, allait être envoyé chez William Herbert, le gars qui avait capturé Edmond Tudor pendant que Marguerite était enceinte.

C’tait d’même au Moyen-Âge : mettons qu’un mineur s’artrouvait orphelin, ben y pouvait être confié à quequ’un qui s’en occupait jusqu’à ce qui devienne majeur. En attendant, le tuteur profitait des revenus des domaines du p’tit, pour ensuite y’ardonner dans le même état quand y’était rendu un homme.

Lui pis sa femme Anne s’occupèrent ben comme faut d’Henri, dans l’amour pis l’agrément, pis s’assurèrent qu’y était ben éduqué; Marguerite avait rien à r’dire su’a façon dont son p’tit gars était traité, ben franchement. Mais quand même. Son p’tit bilou, son p’tit cœur en minou, sa raison d’vivre qui s’en allait loin! A trouva ça vraiment toffe, mais a l’avait pas l’choix.

Pendant ces années-là, Marguerite essaya autant qu’a pouvait d’rester du bon bord du roi, mais mettons que les sparages de ses cousins y rendaient pas la vie facile. Tsé, faut pas oublier que les Beaufort restaient les plus gros adversaires à Édouard.  

Tu’suite après la bataille de Towton, c’tait pas si pire. Édouard essayait ben gros de se mettre chummy avec Henri Beaufort, le nouveau duc de Somerset – le fils de lui qui était mort à Saint-Alban’s pis le grand frére l’autre qui se ferait séparer d’avec sa tête à Tewksbury, plus tard : 

« Heeeeeeeeeeeeeeeeeeeille, Henri mon chum! Écouuute, m’excuse de t’avoir confisqué tes terres; su’l coup, ch’tais fâché, tsé. Mais là, c’t’en arrière de nous-autres, toute ça, hein? Ch’t’ardonne toute! Tu viens-tu jouter au tournoi la fin d’semaine qui s’en vient? Ah, pis j’m’organise une p’tite chasse au chevreuil avec les gars dans pas long, FAUT qu’tu viennes avec nous-autres! J’ai trouvé un super beau spot l’long d’la Tamise, tu vas capoter. »

Sauf que ben vite, Somerset s’artourna contre Édouard pis sacra son camp en Écosse pour aller arjoindre les Lancastriens qui s’taient réfugiés là-bas. 

Édouard était en tabarnak. Y’avait toute mis ses œufs dans l’panier à Somerset, pis Somerset y’avait garroché l’panier dans’face pis s’tait sauvé en courant. Y l’artrouva pis l’fit exécuter comme un chien galeux en arrière d’la grange.

Faique rendu là, toutes les Beaufort étaient suspects aux yeux d’Édouard, pis Marguerite y’échappait pas. Mais, comme une plante grimpante qui se faufile entre les craques pis qui s’accroche après toute c’qu’a peut, a s’organisa pour se tricoter des alliances qui y permettraient de garder une bonne position pis de garantir un bon avenir à son fils. 

Sa meilleure chance était du bord à son mari. Sa belle-mère s’était armariée avec Walter, Lord Mountjoy, un autre grand chum à Édouard pis son trésorier par là-dessus. Si a pouvait s’mettre dins p’tits papiers à Walter, y pourrait la défendre si Édouard pognait les nerfs après elle. Pour ça, fallait qu’a passe le plus de temps possible avec eux-autres : 

— Belle-maman? J’ai entendu entre les branches que vous vous étiez faite faire un nouveau livre de prières! Ch’peux-tu voir ça?
— Ben sûr ma belle! Heille, pis j’ai su que t’avais embarqué dans l’Ordre de la Sainte Trinité pour aider à payer les rançons des chevaliers chrétiens capturés par les Turcs? Chus don ben fière de toé!
— Y’a pas de sacrifice trop grand pour le salut d’mon âme pis celui d’la Chrétienté. Watatow, les belles enluminures! Ouiiin, vous vous êtes gâtée, belle-maman! 

Faique de fil en aiguille pis avec les bons mots à sa belle-mère, a finit par gagner la confiance à Walter. Quand le roi fit emprisonner la vieille veuve du 2e duc de Somerset pis y confisqua toute c’qu’a possédait pour aucune maudite raison à part faire chier les Beaufort, pis menaça de faire pareil à Marguerite, Walter alla parler pour elle : 

« Slaque un peu, Édouard. J’la connais, moé, Marguerite, a vient tout le temps souper chez nous pis est super fine. A ferait pas d’mal à une mouche pis a dit jamais un mot d’travers contre toé. »

Marguerite avait gâgné son pari; à partir de là, Édouard y sacra patience. 

Sauf que là, du jour au lendemain, Warwick força Édouard à l’exil pis ramena Henri VI su’l trône. Toute déboula tellement vite que trois semaines plus tard, Henri VI, Marguerite pis Henri Tudor, qui était rendu à 13 ans, étaient après souper ensemble à Westminster. 

« Heille toé, mon p’tit gars, dit Henri VI tout d’un coup. Ch’t’argarde, là, pis j’me dis que c’est toé qui va toute arranger. Je l’sens dans mes urines, un m’ment’né, tu vas être roi pis tout l’monde, nos ennemis comme nous-autres, vont t’rendre hommage. » 

Marguerite faillit tomber en bas d’sa chaise. Tsé, c’est sûr que rendu là, Henri VI était pu  vraiment toute là, pis y disait probablement ça juste de même. Sauf qu’à ce moment-là pis dins années d’après, même si y’était un roi mou pis incompétent, Henri VI était considéré quasiment comme un saint homme, toute pur pis plogué su’l divin. Déjà que c’tait lui qui avait organisé son mariage avec l’pére à Henri, là, Marguerite capotait : 

« Toute est dans toute! C’t’une PROPHÉTIE! Je l’savais qu’mon fils allait faire des grandes affaires! »

Marguerite était pour jamais l’oublier. Surtout pas quand toute arbascula pas longtemps après, au r’tour d’Édouard. Là, a fit un choix d’irréductible survivante : a tourna l’dos aux Lancastriens pis se mit définitivement du bord à Édouard. Pour que son fils aye un avenir, a pouvait pas risquer de s’tenir avec les perdants, au yâble la famille pis la loyauté. La suite des choses allait y donner raison. 

Sauf qu’après Tewksbury, a l’avait pu d’mari – Henri Stafford était mort en s’battant pour les Yorkistes. Toutes ses cousins Beaufort avaient été massacrés. Henri son fils s’tait sauvé en Bretagne avec son mononcle Jasper pour échapper à Édouard, pis a l’avait aucune idée de si a l’allait l’arvoir un jour. 

Ça r’gardait mal en maudit. Sauf que Marguerite Beaufort, a se laissait JAMAIS abattre. A l’allait mettre son fils su’l trône d’Angleterre, peu importe le temps qu’ça prendrait, pis peu importe c’que ça y coûterait. Pis gare aux innocents qui essaieraient de s’mettre dans son ch’min.

La suite icitte!


Sources : Desmond Seward, The Demon’s Brood : The Plantagenêt Dynasty that Forged the English Nation, 2014.
Philippa Gregory et David Baldwin, The Women of the Cousin’s War, 2011.

Un GROS merci à ceux qui m’encouragent sur Patreon : Christine L., David P., Chrestien L., Daphné B., Herve L., Valérie C., Eve Lyne M., Serge O., Audrey A. et Mélanie L.

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La Guerre des Deux-Roses, partie IV — L’serpent s’mord la queue

Graham Turner, Mistaken Identity – The Battle of Barnet

Avant la Guerre des Deux-Roses, partie I
Avant la Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie I
La Guerre des Deux-Roses, partie II
La Guerre des Deux-Roses, partie III

« Élizabeth! C’t’un garçon! »

Après un mois pognée avec sa bru pis ses trois p’tites-filles dans la maison de l’abbé de Westminster, Jacquette venait d’aider Élizabeth à accoucher, pis a tenait dans ses bras son p’tit-fils flambant neû – l’héritier mâle tant attendu. 

Ça, c’tait une astie d’bonne nouvelle : peu importe c’qui arriverait à Édouard, y’aurait un fils pour lui succéder. Mais c’tait loin d’être gagné. 

Après avoir traversé en Hollande, Édouard avait essayé de se réfugier chez son beauf, le duc de Bourgogne. Sauf qui se riva l’nez su’a porte : le duc accepta d’y donner une pension pour qu’y puisse se réchapper la vie, toujours ben, mais y r’fusa de le voir pis de l’héberger. Cerise su’l sundae, y’envoya une délégation pour féliciter Henri pour son retour su’l trône. Ça, Édouard le digéra JAMAIS. 

Faique Édouard s’pogna un appart dins Flandres, en Belgique. De là, y’entendit que Warwick avait pris le contrôle en s’auto-nommant lieutenant du royaume, avec Georges son frére comme chancelier pis Georges le frére à Édouard comme son numéro deux. En faite, Warwick était tellement au-dessus de ses affaires qu’y avait renvoyé ses troupes.

Sauf que quand l’roi de France déclara la guerre au duc de Bourgogne, beauf se rendit compte qu’y avait p’t-être faite une gaffe en r’virant Édouard de bord : 

— Ahem. Coute ben, mon gars, euh, j’sais que j’ai peut-être été un peu bête a’c toé quand t’es v’nu me demander d’l’aide… Ch’file ben cheap de t’ça, pis euh, j’aimerais ça me racheter.
— Ouin. T’as peur à tes fesses à cause du roi d’France, pis tu sais que Warwick est d’son bord, faique tu penses que si tu m’aides à r’prendre mon trône, ben moé j’vas t’aider dans ta guerre?
— Genre…

À ch’fal donné, tu r’gardes pas l’faux-cul qui tient la bride. Ou de quoi d’même. Faique Édouard, greyé d’une p’tite armée équipée par son beauf, prit l’bateau pour l’Angleterre. Pis là, comme le raconterait Pierre Houde : 

« Édouard traverse la patinoire… Il arrive aux portes de la ville d’York et fait semblant d’être fidèle au roi Henri pour que les défenseurs le laissent entrer. Quel stratagème!
Sauf que les renforts arrivent de tous les côtés! Édouard est gonflé à bloc et se proclame de nouveau roi! Ma parole!
Warwick joue de prudence… Il reste sur le banc en attendant que Georges, duc de Clarence, arrive avec des renforts… Sauf que Georges se retourne contre Warwick et rejoint l’armée de son frère! Oh lala, Marc, quel revirement!
Édouard est maintenant en avantage numérique. Il part en échappée vers Londres, tire, ET LE BUT! Dans un filet désert! » 

Scusez-la — ch’commence à m’ennuyer du hockey pas mal. Ouep, même des games à TVA Sports. Mais surtout de mon beau Pierre.  

Édouard rentra dans Londres sans que parsonne assaye de l’empêcher – Henri, laissé tu’seul par Warwick, en était rendu à s’promener comme un quêteux dans’ville, avec l’archevêque d’York qui l’tenait par la main, pour demander au monde de s’battre pour lui. 

— ÉDOUARD!
— Bebé, ch’t’arvenu! 

Mots doux, larmes, pis p’t-être même un french pendant qu’parsonne argardait : la pauvre Élizabeth put enfin sortir de sa cachette pis s’garrocher dins bras de son mari qu’a l’avait pas vu depuis 7 mois. C’tait comme si une roche de 100 livres v’nait de s’ôter de su ses épaules.

A put aussi enfin y présenter son nouveau ti-poutte – nommé Édouard lui avec, pour encore plus mêler les affaires. 

— Là, chéri, tu vas faire quoi avec Warwick? Tu peux pas l’laisser courir lousse de même, des affaires pour qui t’arpoignarde dans l’dos!
— Non, je l’sais. En plus, tu sais pas la meilleure : Marguerite d’Anjou est après s’en venir avec une armée!
— Câline! Faut que tu règles son cas à Warwick avant qu’a l’arrive, d’abord.
— Drette ça. Compte su moé, bebé. 

Entre les deux cousins, c’tait l’affrontement final, comme dins vues, avec la grosse toune épique, pis c’est proche de la ville de Barnet que ça allait se passer. Warwick avait une armée beaucoup plus grosse que celle à Édouard, faique Édouard se dit que si y voulait avoir une chance de gagner, fallait qu’y l’pogne par surprise.

Faique dans’nuite, y’ordonna à ses hommes de s’rapprocher tranquillement de l’armée à Warwick, dans l’noir pis dans l’silence. 

— Ayoye! Tention avec ton astie d’waguine, tu viens de m’rouler su’l pied!
— Ta yeule pis r’garde où c’tu vas, l’cornet, y vont nous entendre! 

Toute la nuite, Warwick ordonna des tirs de canon dans l’boutte où y pensait que l’armée d’Édouard était, mais y passa dans l’beurre. Pendant c’temps-là, son frére Jean, marquis de Montagu – le gars qui avait trahi Édouard jusse avant qu’y parte en exil, vous rappelez-vous? – vint l’voir : 

— Ouin, Ritch, nos hommes ont la falle basse pas mal. Sont pas super motivés.
— Ah ouin?
— Ouin. Pour les crinquer, m’as te proposer d’quoi : si on s’battait à pied? Quand les soldats voient un commandant à ch’fal, sont comme : « Pff! Dès qu’ça va s’mettre à mal aller, y va crisser son camp pis nous laisser là ». Si on est à pied comme eux-autres, ça va leux montrer qu’on est prêts à s’battre à mort pis les inspirer.  

Faut dire que c’tait un peu sa marque de commerce, à Warwick, de crisser son camp quand la marde pognait. Quand même : rendu au matin, Warwick pis Montagu étaient à pied au milieu d’l’eux hommes. 

La bataille commença vers 4 h du matin dans une astie de brume épaisse. Comme les deux armées voyaient pas grand-chose, la coordination était pas vargeuse.

Un m’ment’né, le comte d’Oxford, qui était du bord de Warwick, arsoudit avec ses troupes pas loin de celles du marquis de Montagu. Sauf que, dans l’flou, sa bannière, une étoile, arsemblait pas mal au soleil qu’y avait sur celle-là à Édouard. Croyant que les troupes à Édouard les pognaient par en arrière, les hommes de Montagu capotèrent pis tirèrent une volée de flèches drette dans leux alliés!

Le comte d’Oxford cria tu’suite à la trahison : après toute, ça aurait pas été la première fois que Montagu changeait d’camp. 

Quand la brume commença à se lever, Édouard vit la ligne lancastrienne après s’autodétruire pis fuir en panique : 

« Ben coudonc. Reste pu yinque à envoyer les forces de réserve pour finir la job! »

Warwick, fidèle à lui-même, partit à’course pour s’trouver un ch’fal, mais y s’fit pogner pis tuer, pareil comme son frère Montagu. C’tait feni. 

Mais pas tout à faite. Pour avoir la paix, fallait qu’y se débarrasse de Marguerite d’Anjou, qui v’nait yinque d’arriver en Angleterre avec son armée. S’un dix cennes, sans même une croûte ni un ti dodo, Édouard s’arvira pis clancha pour la pogner avant qu’a s’allie avec les Lancastriens de l’ouest de l’Angleterre pis du pays d’Galles. 

Marguerite avait eu une sapristi d’misère de chien à s’rendre là-bas : chaque fois qu’a l’avait essayé de prendre la mer, une tempête l’avait r’poussée vers les côtes de la France. Là, a s’en allait arjoindre ses alliés avec son fils Édouard de Lancaster, qui était rendu à 17 ans, pis le duc de Somerset – le troisième depuis que le premier avait été tué à la bataille de Saint Alban’s; la Guerre des Deux-Roses passait au travers des ducs de Somerset comme moé au travers de mes paires de bas. 

Sauf qu’Édouard (d’York, le roi, là) avait été vite sur la switch pis avait envoyé un messager pour dire au seigneur du château de Gloucester de pas les laisser traverser la rivière Severn. Pognés, Marguerite pis sa gang durent continuer jusqu’à Tewkesbury, la prochaine place où c’tait possible de traverser – pis c’est là qu’Édouard les rattrapa. 

Marguerite dut aller se réfugier dans un monastère pendant la bataille. Toute sa vie, a s’tait démenée pour garder son fils en sécurité pis défendre son droit au trône d’Angleterre. Pis là, tandis que ça regardait mal en maudit pour sa cause, y’était en plein centre de l’armée lancastrienne, prêt à se battre comme un homme, pis y’avait pu rien que Marguerite pouvait faire. C’te jour-là, y’allait gagner la couronne ou bedon perdre la vie. 

La bataille de Tewkesbury ressembla pas pantoute à la bataille de Towton, qui avait été horrible pis meurtrière pis interminable; en faite, Édouard gagna pas mal facilement face à Édouard de Lancaster pis au nouveau duc de Somerset, qui étaient pas super expérimentés. 

Édouard de Lancaster fut tué dans la bataille, comme à peu près toute c’qui restait d’hommes dans la famille Beaufort – les cousins d’la fesse gauche à Henri VI, pis les seuls qui auraient encore pu prétendre au trône contre Édouard d’York. Essentiellement, Édouard le roi avait moppé l’plancher avec ses ennemis, pis y restait pu personne pour se mettre contre lui. 

Marguerite eut pas le choix de se rendre. Son fils était mort, pis elle, a l’était comme morte en-dedans. Y lui restait pu rien. Édouard la fit enfermer, mais y’a traita quand même bien. Pas longtemps après, a reçut une autre mauvaise nouvelle : 

— Madame! Ça me fait ben de la peine de vous dire ça, mais vot’mari est mort dans la tour de Londres…
— On sait-tu comment c’t’arrivé?
— Ben, le roi dit qu’y est mort de peine en apprenant la mort de vot’fils pis la défaite à Tewkesbury…
— Messemble, oui.

C’tait clair qu’Édouard l’avait faite tuer. Mais rendu là, ça faisait pu de différence. Marguerite resta emprisonnée pendant quatre ans en Angleterre jusqu’à ce que le roi de France paye sa rançon. Pis après, a tomba dans la calvette de l’histoire pis mourut 7 ans plus tard à l’âge de 52 ans. 

Quant à Édouard, y’avait gagné su toute la ligne, pis sa dynastie avait l’air en béton. Ses deux fréres plus jeunes étaient mariés chacun avec une fille à Warwick – Georges était marié avec Isabelle depuis un boutte, pis Richard s’tait marié avec Anne, qui avait été la femme à Édouard de Lancaster pis qui s’était ramassée veuve après la bataille de Tewkesbury. Y’avait trois filles à marier pour faire des alliances politiques pis un gars pour y succéder. Dins années à venir, y’allait avoir encore 6 enfants avec Élizabeth, 2 gars pis 4 filles, en plus de toutes les bâtards qu’y avait faites à ses maîtresses. Athlète des couvartes un jour, athlète des couvartes toujours.

Y se sentait tellement solide qu’y pardonna à pas mal toutes ses anciens ennemis. Y’était aimé par le peuple, pis tout le monde le trouvait fin, généreux pis l’fun. Dans son livre à lui, la Guerre des Deux-Roses était fenie. 

Sauf que tsé, vous vous doutez ben qu’y reste des épisodes. 

Le sang avait pas fini d’couler. 

Faique c’pas l’temps d’s’endormir! Y’a tu quequ’un qui veut un ti café Chemineaud? 

Mononc! Part l’eau à bouillir! <

La suite icitte!


Sources : Desmond Seward, The Demon’s Brood : The Plantagenêt Dynasty that Forged the English Nation, 2014.
Helen Castor, She-Wolves: The Women Who Ruled England Before Elizabeth, 2011.
Philippa Gregory et David Baldwin, The Women of the Cousin’s War, 2011.

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Avant la Guerre des Deux-Roses, partie II – La bataille d’Azincourt

Sir John Gilbert, Le matin précédant le bataille d’Azincourt

Partie I

Ok! Wé toutes là? 

Toé le grand slaque, tasse-toé don un ti peu pour que la pauvre chatte en arrière puisse voir de quoi. 

C’est beau, merci, mon pit!

Donc, l’ex-roi Ritch se faisait emmener en prison en braillant sa vie, pis Henri IV commençait son règne. 

Henri, ça y’avait pas trop tenté de devenir roi. Son cousin y’avait quasiment tordu le bras pour l’obliger à usurper la couronne, pis ça le faisait limite chier de se retrouver sur le trône. Ça questionnait sa légitimité de tou’és bords, pis lui-même y crèyait pas trop, dans l’fond. Mais pareil. Tant qu’à être là, y’allait s’accrocher.

Comme Ritch était encore vivant, ça arrêtait pas de grenouiller pour le remettre sur le trône, entre autres en assassinant Henri. Un m’ment’né, dans son litte, un serviteur trouva même une chausse-trappe – tsé une espèce de patente épouvantable avec des bouttes pointus qui sert à estropier les chevaux pis l’monde quand y marchent dessus? 

Henri avait pas pantoute envie de tuer son cousin non plus, mais comme y’allait jamais avoir la paix tant qu’y allait être en vie, y s’organisa pour « l’oublier », pis Ritch finit par mourir de faim. Quand même ironique pour un gars qui avait 300 employés dans sa cuisine. 

Mais on y sacra pas la paix à Henri pour autant. Le roi d’Écosse y lâcha une craque dans une lettre en l’appelant « duc de Lancaster » plutôt que roi, faique y partit lui crisser une volée. 

Pis quand c’tait pas les Écossais, c’tait les Gallois qui faisaient d’la marde. Leu rébellion, backée par la France, dura une grosse partie de son règne.

Le Parlement faisait exprès pour l’écœurer; chaque fois qu’y demandait d’l’argent, y se faisait répondre :

« Z’avez yinque à piger dins joyaux à Richard, hein? Où c’qui sont passés, dites-nous don ça? » 

Pis en plus, Henri était souvent malade. Bref, y’eut pas trop de fun pendant ses 13 ans de règne. Quand y passa l’arme à gauche, c’est son fils aîné, un autre Henri, qui devint roi. 

Rendu là, ça faisait déjà 70 ans qu’Anglais et Français se tapaient su’a yeule, même si ça avait quelque peu slaqué pendant les règnes de Richard pis d’Henri IV. Aussitôt qu’il eut la couronne su’a tête, le nouveau roi se dit : 

« Bon. P’pa avait yinque une fesse sur le trône, pis tout le monde arrêtait pas de le traiter d’usurpateur. Pis moé, ben j’ai une trâlée de p’tits cousins qui pourraient aussi ben revendiquer ma couronne. Là, qu’est-cé qui pourrait m’rendre plus solide? L’monde aiment ben ça, les victoires militaires. Faique ch’pourrais, genre, arpartir la guerre contre la France? Heille, c’est bon, ça. Si j’gagne, y’aura pu personne pour venir m’écœurer! »

Faique y commença drette là à accumuler de l’argent, des munitions pis à se monter une armée. Deux ans après, au mois d’août, y partit en campagne. 

Y commença par attaquer le port de Harfleur; le siège dura six semaines dans la grosse chaleur épouvantable. La ville finit par se rendre, mais la dysenterie pis la malaria pogna dans les rangs anglais : 2 000 hommes moururent drette là, pis 2 000 autres durent artourner en Angleterre pour se faire soigner. 

En partant, Henri avait l’intention de s’rendre jusqu’à Paris. Mais comme y’avait pardu pas mal de monde pis qu’y était rendu tard dans l’année, à’place, y décida de marcher jusqu’à Calais, une ville qui appartenait aux Anglais à c’te moment-là. Ça faisait une trotte de 250 km à ch’fal, en plein bois, dans’pluie, pis en terrain ennemi : 

« M’as leu marcher ça dans’face, les Français! Dieu est d’mon bord pis m’as leu montrer qu’y peuvent rien faire contre moé! »

Mais là, les Français furent informés de t’ça, faique y clanchèrent pour pogner les Anglais en chemin. 

Henri pis sa gang avaient vraiment pas de fun. Les ponts sur la Somme avaient été démolis, faique ça les força à faire un détour; y mouillait à siaux; y manquait de provisions, tellement que les soldats devaient survivre su des noix pis des p’tits bouttes de viande séchée; pis la dysenterie continuait de faire des ravages, tellement que les hommes gardaient leux culottes baissées, pis le flux coulait le long des flancs de leux ch’faux. Bref, c’tait la grosse misére nouère. 

Le 20 octobre, un émissaire français arriva pis dit à Henri que l’armée française s’en venait pis qu’y était aussi ben d’attacher son casse avec d’la broche. Henri lui répondit yinque de décrisser pis de pas se mettre dans ses jambes. 

Henri pensait encore être bon pour se rendre à Calais, mais, 4 jours plus tard pas loin de la ville d’Azincourt, un éclaireur arvint au camp anglais en capotant ben raide : 

« Votre Altesse, sont deux fois plusse que nous-autres, sacrament! »

Shit. Henri sut à ce moment-là qu’y avait pu moyen d’éviter une bataille, pis que la puck roulait crissement pas pour lui. 

C’te soir-là, y’eut une file de 200 pieds d’long en avant d’la tente du curé : tout l’monde voulaient s’confesser, d’un coup qu’y meurent le lendemain. Les faces étaient longues, les assiettes étaient vides, ça sentait la marde, pis y mouillait, crisse qu’y mouillait! 

De l’autre bord, c’tait pas mal plus jojo : le maréchal Boucicaut, qui était à la tête de l’armée française, était hyper sûr de sa shot, pis c’tait semi l’party dans l’camp. 

Tsé, on peut les comprendre d’être au-dessus d’leux affaires. L’armée anglaise, c’tait aux trois quarts une gang d’archers crottés, du monde ordinaire payés par le roi pour s’engager dans l’armée. L’armée française, c’tait en grande partie des chevaliers avec la grosse armure pis toute le kit, comme dins romans courtois, des gars qui passaient toute leur temps pis leur argent dans l’combat – autrement dit, l’équivalent médiéval de des chars d’assaut. Y’allaient passer su’és Anglais comme un tracteur s’un siffleux. 

Le lendemain, y mouillait encore, viarge. 

Les Anglais se placèrent dans un grand champ où les semailles venaient d’être faites, en haut d’une p’tite côte, avec un bois de chaque bord. Les fantassins étaient au milieu, pis les archers étaient chaque bord. 

Pis là, Henri arriva devant son armée, à cheval, avec un casse plaqué or pis un diadème de perles, de rubis pis de saphirs. Ça flashait en astie : 

« Chus v’nu icitte pour ravoir l’héritage qui m’arvient de droit : le trône de France! Oubliez pas qu’les Français ont juré de couper les doigts de la main droite de tou’és archers qui captur’raient! Faique faites-vous pas pogner! Mais vu qu’Jésus est mort su’a croix pour nos péchés, ben qu’chaque homme trace une croix à terre pis l’embrasse, pour se rappeler que c’est mieux d’mourir su’a terre icitte là que d’se sauver comme des pissous! » 

Les Français, eux-autres, attendaient en bas d’la côte. Le maréchal voulait que les Anglais les attaquent en premier, mais après trois heures à rester plantés là comme des codindes, les fantassins pis les chevaliers commençaient à faire la queue d’veau. 

Finalement, Henri fit avancer son monde juste assez proche pour que les archers puissent tirer.

Quand les Français reçurent les premières flèches par la tête, y’avait pu moyen d’les arrêter de foncer comme des malades, un peu tout croche. Pis à part ça, c’est pas tout le monde qui partit en même temps, parce qu’y avait des chevaliers qui s’étaient tannés d’attendre pis qui étaient partis nourrir leu ch’fal ou tirer une pisse. 

Entécas, ce fut une astie de catastrophe. 

Le maréchal Boucicaut avait prévu pogner les archers par le flanc pis les massacrer, mais à cause du bois de chaque bord, ses hommes durent laisser faire pis y’aller tête première en montant la côte.

Les ch’faux se faisaient blesser par les flèches pis se mirent à paniquer; après avoir crissé leu cavalier à terre, y’arpartirent à courir dans l’autre sens pis piétinèrent des fantassins en arrière. 

Faique les chevaliers continuèrent tous seuls. Les grosses armures, ça faisait en masse la job contre les flèches; c’tait comme avancer en char s’un chemin d’terre avec les taons à chevreuil qui pètent dans l’winshire. Le problème, c’est que les casses avaient yinque une fente pour voir, faique les chevaliers devaient avancer tête baissée pour pas manger de flèche dans l’œil. 

Mettons que c’tait pas vargeux. 

Les Français avaient aussi des arbalétriers, mais y’avaient pas assez de place pour tirer sans pogner leux alliés. Comme j’ai dit, y’étaient deux fois plus nombreux que les Anglais, mais là, ça leu servait pas à grand-chose, parce que le terrain entre les deux bois était pas assez large. Y se pilaient su’é pieds pis se nuisaient les uns aux autres : 

« Voyons, crisse! Tassez-vous! Chus même pas capable de m’sarvir de ma lance! »

Au fur et à mesure que ça mourait en avant, ceux qui suivaient devait passer par-dessus les cadavres. 

Pis comme ça allait pas assez mal de même, le champ avait viré à la grosse bouette qui colle. Les Français calaient aux genoux pis ça leu prenait toute pour avancer. Pis quand y tombaient, leu chien était pas mal mort : leur armure était trop pésante pour qu’y se relèvent, les autres leu pilaient dessus, pis y’en a plein qui finirent noyés dans leu casse. 

Une autre vague de Français se lâcha à l’assaut, mais y firent juste embarrasser encore plus le champ de bataille, poussant dans l’cul des premiers en avant pis finissant pareil comme eux-autres, effoirés dans la bouette. 

Les « crottés » de monde ordinaire, eux-autres, y’avaient pas de grosse armure, faique la bouette les faisait pas mal moins chier. Quand les archers finirent par manquer de flèches, y’embarquèrent dans l’tas avec des haches, des épées pis même des marteaux. 

Le roi Henri, lui, y’était pas assis su son steak en arrière avec son beau casse plaqué or; y’était drette dans la mêlée. En fait, en défendant son p’tit frère le duc de Gloucester qui s’tait faite blesser à la fourche, y mangea un coup de hache su’a tête qui fit décoller une partie de son diadème. Mais là, y s’artrouva avec un tapon de prisonniers. Y’en avait tellement qu’y étaient plus nombreux que l’armée anglaise au complet : 

« Crisse, d’un coup qu’y s’en rendent compte pis qu’y en profitent pour nous massacrer par en arrière? Ch’peux pas laisser faire ça… Calvaire, j’aime pas ça, mais j’ai comme pas l’choix… » 

Faique, contrairement aux règles de chevalerie du temps, y’ordonna qu’on tue toutes les prisonniers, sauf ceux qui pourraient donner une bonne rançon, genre, les nobles. Ça resta une grosse tache sale sur son règne, pis si y’avait faite de quoi d’même aujourd’hui, le Tribunal pénal international y’aurait claqué un procès pour crime de guerre assez sec. 

Pis là, finalement, après même pas 4 heures de bataille, les Français étaient toutes soit morts, soit prisonniers, soit en train de se sauver la queue entre les jambes. Quand Henri s’en aperçut, y’arrêta direct l’exécution des prisonniers. Les Anglais avaient perdu quelques centaines d’hommes, pis les Français, des milliers, dont une trâlée de monde important – des ducs pis des chevaliers pis plein de haut gradés. 

C’tait une sacrament d’volée historique. 

Après ça, y retourna en Angleterre sous les confettis pis de ding dong des clochers d’église. Y réussit pas à conquérir le trône de France à ce moment-là, mais y réussit à rendre le sien crissement plus solide. Même les épais qui avaient encore le piton collé sur Richard prirent leur trou pour de bon. 

Mais là, c’tait pas comme si l’royaume s’en allait vers des horizons meilleurs avec des p’tits anges pis des arcs-en-ciel, le sourire fendu jusqu’aux oreilles, avec son beau roi neuf pis victorieux. 

Pour savoir comment ça a viré, ben allez vous dégourdir les jambes pis r’venez dans 15 minutes. Moi-même, ch’commence à avoir la fesse engourdie!  


La suite ici!


Source : Desmond Seward, The Demon’s Brood : The Plantagenêt Dynasty that Forged the English Nation, 2014.


Un GROS merci à ceux qui m’encouragent sur Patreon : Christine L., David P., Chrestien L., Daphné B., Herve L., Valérie C., Eve Lyne M., Serge O. et Mélanie L.

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Æthelflæd, la princesse qui sacra une volée aux Vikings

**C’est une version remastérisée 4K Ultra HD Dolby Surround 7.1 d’un de mes plus anciens articles. Mais c’est pas juste « du vieux stock »! J’ai refait mes recherches, réorganisé le contenu et ajouté beaucoup de choses!


Au IXe siècle, ça allait ben mal en Angleterre. En fait, l’Angleterre comme telle existait même pas encore : c’était juste un tapon de petits royaumes anglo-saxons, comme la Mercie et le Wessex, attaqués de tous bords tous côtés par les Vikings qui pillaient, violaient, tuaient pis brûlaient tout ce qui bougeait – pis ce qui bougeait pas. Bref, c’était la grosse misère noire.

C’est dans ces années-là que grandit Æthelflæd*, la fille aînée d’Alfred, roi du Wessex. Alfred, qu’on a fini par appeler « le Grand », c’est le Charlemagne des Anglais : un protecteur des arts pis de l’éducation, qui rêvait d’un grand royaume uni. Il fit éduquer sa fille aussi ben que ses fils, pis la princesse en apprit beaucoup sur la politique et la guerre, juste à le regarder aller.

Quand Æthelflæd eut l’âge qu’y fallait, Alfred arrangea son mariage avec le seigneur Æthelred de Mercie, son voisin, histoire de se mettre chum avec. C’est de même qu’il scella une alliance militaire entre le Wessex et la Mercie pour mieux combattre les Vikings.

Là, vous devez être comme : « Voyons, c’tu moé, où y s’appellent toute Æthel-quequ’chose? » Vous avez rien vu : le père d’Alfred s’appelait Æthelwulf, ses frères s’appelaient Æthelbald, Æthelberht pis Æthelred, ses neveux s’appelaient Æthelhelm pis Æthelwold, pis une autre de ses filles s’appelait Æthelgifu. « Æthel », en vieil anglais, ça voulait dire « noble ». C’qui faut en retenir? Les nobles saxons, y manquaient peut-être d’imagination, mais y se prenaient pas pour de la marde.

Mais revenons à nos moutons. Pas longtemps après ses noces, Æthelflæd eut une fille, Ælfwynn. Normalement, son rôle, comme celui des autres femmes du temps, aurait dû se limiter à produire une trâlée d’héritiers – des gars, de préférence. Sauf que ça se passa pas de même :

« Bon, ben, mon mari, c’est ben d’valeur, mais c’est fini les mamours à partir d’à c’t’heure. J’ai fendu de bord en bord en accouchant d’Ælfwynn, pis c’est juste pas digne de la fille d’un roi de souffrir de même. Y’est pas question que je r’commence. »

En plus, quelques années plus tard, Æthelred, qui était pas mal plus vieux que sa femme, pogna une maladie qui le rendit grabataire et pas capable de s’occuper de son royaume. Faique Æthelflæd mit ses culottes et régna sur la Mercie à sa place.

Mais on s’entend qu’avec les Vikings dans le coin, c’était pas pour être relax. Pas intimidée pour deux cennes, Æthelflæd fortifia des villes, signa des traités, entre autres avec les Écossais, pis mena des campagnes militaires en son nom à elle, ce qui était vraiment pas ordinaire pour le temps. On se mit à parler d’elle jusque dans les autres royaumes.

C’est d’ailleurs des Irlandais que nous vient l’histoire de la bataille de Chester. Dans les « Annales fragmentaires », y racontent qu’un m’ment’né, Ingimund, un chef viking, pis sa gang de fiers-à-bras arsourdirent chez Æthelflæd, la falle ben basse :

– Bonjour, Votre Splendeur. Les Irlandais nous ont crissés dehors, pis on a nulle part où aller. On pourrait-tu s’installer dans votre boutte? Pas pour vous faire de la marde, là. On est tannés de la guerre pis du tuage. On veut juste s’installer tranquilles – une p’tite maison, une femme, une couple de vaches pis des flots. Vous voyez le genre? 
– Ouin…. Si vous promettez de vous tenir tranquilles, j’peux ben vous donner des terres pas loin de Chester, répondit Æthelflæd. Mais vous avez d’affaire à filer doux, c’tu clair?
– Oui oui, pas de trouble, Votre Magnificence. On va être fins, promis.

Ingimund s’installa donc où Æthelflæd lui avait dit. Mais là, y trouva ben vite que ses terres faisaient dur à côté des autres dans le boutte de Chester, faique il alla se lamenter à ses chums vikings qui restaient pas loin :

« Les gars, on ira pas chier loin avec des terres de marde. Un fou d’une poche, moé, comme si j’allais continuer de me barrer le dos à enlever des roches dans mon champ de ti-coune quand y’a plein de bonnes terres autour pis une ville bourrée de richesses qui attendent yinque d’être ramassées! Si on se met en gang pis on se rend à Chester, on va leur demander poliment de nous donner plus de terres. Pis si ça marche pas, ben on attaque, on tue tout le monde pis on prend la place. Ça marche-tu? »

Faique Ingimund et compagnie se préparèrent à marcher sur Chester. Y se pensaient ben fins, eux-autres-là : c’était pas le seigneur de Mercie pis sa femme – un vieil infirme pis une petite madame – qui allaient leur faire peur. Y le savaient pas encore, mais le sourire allait leur débarquer de dans la face. Assez raide à part ça.

C’est parce qu’Æthelflæd avait des oreilles partout, pis elle avait vite entendu parler de la petite jasette qu’Ingimund avait eue avec les autres chefs vikings. Elle niaisa pas avec la puck : elle rassembla drette là l’armée mercienne et clancha pour défendre la ville.

À son arrivée à Chester, Ingimund, comme prévu, demanda qu’on lui donne ce qu’y voulait, sous peine de crise de bacon meurtrière. Y se fit revirer de bord assez sec. Ça allait être le carnage.

Mais, loin d’être folle, Æthelflæd avait une idée ben précise. Elle commença par affronter les Vikings dans les champs autour de Chester. Puis, après une petite secousse, elle ordonna à ses troupes de rentrer dans la ville, comme s’ils se sauvaient.

Ingimund pis sa gang, tellement attisés qu’ils voyaient pu clair, partirent après les soldats d’Æthelflæd et les suivirent jusqu’à l’intérieur de la ville. C’était ben de valeur pour eux-autres, parce que dès qu’ils furent rentrés, Æthelflæd fit fermer les portes derrière eux, pis le reste des troupes merciennes, qui étaient restées cachées dans la ville, les défirent en bouttes jusqu’au dernier.

Æthelflæd était ben fine, mais fallait pas la prendre pour une valise.  

Rendu là, son père, Alfred, avait trépassé. Edward, le frère d’Æthelflæd, lui avait succédé sur le trône du Wessex. Faique pendant qu’Æthelred dépérissait dans sa chaise berçante, Edward et Æthelflæd formaient une équipe de feu contre les Vikings : fantasses, ils menèrent des raids jusque vraiment creux dans le royaume de Northumbrie occupé par l’ennemi.

Les Vikings trouvaient qu’ils commençaient à ambitionner. Faique un m’ment’né, pensant qu’Edward était parti au sud avec ses troupes, pis commettant eux-autres aussi l’erreur de pas se méfier d’Æthelflæd, ils descendirent la rivière Severn jusqu’au beau milieu de la Mercie et se payèrent la traite : pillage, violage, brûlage, tuage – la totale.

Sauf que quand ils voulurent arvirer de bord, les drakkars bourrés de stock volé, Æthelflæd et Edward les attendaient avec une brique pis un fanal à Tettenhall. Pognés entre deux armées, ils mangèrent une volée tellement épouvantable qu’ils s’en remirent jamais vraiment : les Vikings de Northumbrie furent carrément étêtés pis prirent leur trou sur un moyen temps.

Pis là, la maladie finit par achever Æthelred. La Mercie avait plus de seigneur. 

Alors, quand les nobles merciens se réunirent pour jaser succession, ça se passa à peu près de même :

– Bon, ben maudine, notre seigneur a trépassé. Quessé qu’on fait, gang? Y’a pas de gars pour lui succéder…
– Ben, je trouve que la créâture se débrouille pas pire, depuis quasiment dix ans. Si on faisait juste… la laisser continuer de même? C’tu dis de t’ça, toé, mon Ecgberht? – Pas fou, Beorhtfrith, pas fou pantoute! Pis toé, Cynewald, lâche le pichet d’hydromel pis dis nous c’que t’en penses!
– Euh… J’ai pas de trouble avec ça, moé! Faique c’est réglé. On se câlle-tu du sanglier pour fêter ça?

Æthelflæd reçut donc officiellement le titre de « dame des Merciens », faique aussi ben dire qu’elle était reine. Imaginez ça! Une femme sur le trône d’un royaume anglo-saxon, dans la société ultra-macho de l’époque! C’était jamais arrivé avant et ça rarriverait pas avant un méchant boutte.  

Pis pour elle, pas question de se remarier. Comme dit la Bible, « le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l’Église », faique un nouveau mari aurait tout de suite pris possession de ses territoires pis l’aurait envoyée y faire une sandwich.

Faut dire qu’elle avait quand même raison de s’en faire avec ça.

Rendu là, son père, qui rêvait d’unir toutes les royaumes anglos-saxons, était mort. Edward, le frère d’Æthelflæd, qui lui avait succédé sur le trône du Wessex, trouvait lui aussi que ça serait pas pire pantoute d’être roi de toute l’Angleterre. Mais là, y’était ben embêté :

« Bon, qu’est-cé m’as faire, moé-là? Ch’peux pas être roi de toute l’Angleterre sans annexer la Mercie. Mais ça paraît mal en christie de tasser sa propre sœur pour pogner ses terres. »

Faique y fit un compromis : il prit possession des villes de Londres et d’Oxford, qui appartenaient à la Mercie. Ça envoyait un message à Æthelflæd : ch’taime ben, ma sœur, mais tu peux rester là yinque parce que chus pas un trou de cul.

Depuis la bataille de Tettenhall, l’équilibre des forces avait changé pour de vrai. Aethelflaed avait maintenant assez de lousse pour se lancer dans un gros programme de construction de forteresses drette dans la face des Vikings.

Quand elle eut fini, la dame de Mercie passa à l’offensive. Elle profita du fait qu’une partie des Vikings de Derby étaient dans le sud en train de se battre contre Edward pour s’emparer de la ville pis annexer la région au complet. Sa réputation de cheffe de guerre courageuse, efficace et ratoureuse grandissait.

Quand elle se pointa devant la ville de Leicester, occupée par les Vikings, le chef de la place savait ce qui était bon pour lui pis se rendit sans s’astiner.

Un m’ment’né, même les Vikings de la cité d’York décidèrent qu’il valait mieux pour eux-autres d’avoir Æthelflæd de leur bord, faique ils lui promirent leur loyauté en échange de sa protection.

Malheureusement, Æthelflæd mourut avant d’aller là-bas pour rendre ça officiel. Drette de même. Paf. On sait même pas de quoi. Sa fille Ælfwynn lui succéda, mais là, Edward, tanné d’attendre, dit :

« Ok, c’est beau, ma p’tite, Mononc va s’occuper du reste ».

Il shippa sa nièce dans un couvent et s’empara de la Mercie. Ça fit solidement chier les Merciens, mais c’tu voulais qu’y fassent?

C’est plate, mais il y eut quand même une consolation : Æthelstan, le fils d’Edward, avait été élevé chez Æthelflæd, qui s’occupa de son éducation. Il succéda à son père et devint le premier roi d’une Angleterre unie, en grande partie grâce aux succès militaires de sa brillante matante.


Sources principales
Le Registre mercien : http://www.dot-domesday.me.uk/mercia_three.htm
Les Annales fragmentaires d’Irlande : http://www.dot-domesday.me.uk/fragments.htm

Boudicca, la reine guerrière que les Romains auraient jamais dû écœurer

Boudicca, reine des Iceni. Charles Hamilton Smith, 1815.

Au temps de leur conquête de la Bretagne* – pour vous situer, c’était pas longtemps après la mort du p’tit Jésus –, c’que les Romains faisaient avec les peuples conquis, c’était leur dire : « Soyez fins, payez-nous des impôts pis des taxes, pis on brûlera pas vos champs pis vos villages pis on violera pas vos femmes, OK? » On appelait ça le principe des royaumes-clients.

Prasutagos était le roi d’un de ces royaumes-clients-là, celui des Iceni, des Bretons qui vivaient dans le sud de ce qui est rendu l’Angleterre. Comme il avait pas de garçon pour lui succéder pis qu’y commençait à être magané, il voulait être sûr que sa femme, Boudicca, pis ses deux filles allaient être correctes après sa mort.

Il aurait pu adopter un gars et en faire son héritier, mais il était ben décidé à ce que ses filles lui succèdent. Faique dans son testament, il leur légua la moitié de son royaume, pis l’autre moitié aux Romains.

« Ça a de l’allure, messemble? Vu que je file doux avec eux-autres pis que leur laisse la moitié, y vont laisser mon peuple tranquille pis ben traiter mes filles. »

Ah, mon pauvre ti pit! T’avais de bonnes intentions, mais si t’avais su ce qui aller se passer après…


Boudicca, la femme de Prasutagos, était une méchante pièce de femme. Imaginez-là, grande pis solide comme un chêne, le pied sur une roche, le regard au loin, sa crigne de feu longue jusqu’aux fesses qui flotte au vent. L’historien romain Dion Cassius a écrit qu’elle était « épeurante à voir » et qu’elle « possédait plus de jarnigoine que les femmes en général ». (Qu’est-ce tu veux dire par là, exactement, Ti-Casse?) Si a regardait l’horizon de même, c’est parce qu’elle était inquiète pour l’avenir : son mari venait de mourir, pis elle trustait pas pantoute les Romains.

Jusque-là, les Iceni avaient pu faire leur petites affaires tranquilles dans leur coin, pis les Romains r’soudaient juste quand c’était le temps de ramasser les impôts. Mais Boudicca, elle, savait ben que c’était sur le bord de changer.

« Watchez-vous, dit-elle à ses filles, dont l’histoire a pas retenu le nom. La marde va pogner, je le sens dans mes urines. »

Elle avait ben raison de s’en faire : la seconde qu’il apprit que Prasutagos était mort, le procurateur** Catus Decianus lut son testament, vit « empereur Néron » sur le parchemin et passa par-dessus le nom des deux filles comme si c’était juste des barbots – contrairement aux peuples celtes de Bretagne, il s’en contre-câlissait, lui, des droits des femmes.

« Heille! On vient d’hériter d’un royaume! Venez-vous en, les gars! »

Faique il ramassa ses centurions et partit faire une virée au royaume des Iceni, en commençant par la villa de Boudicca.  

Les Romains arrivèrent, bing bang, bonjour ma p’tite madame, tassez-vous sivouplaît qu’on vide la place – la version antique d’une gang de déménageurs en calotte qui débarquent le 1er juillet avec des straps, un diable pis des boîtes en carton.

Ben crère que Boudicca allait pas se laisser faire :

– Heille! C’est chez nous icitte! Remettez toute où c’que vous l’avez pris pis crissez votre camp!
– C’est ben de valeur, lui répondit Catus Decianus, mais ça appartient toute à l’empereur, à c’t’heure. Faique fais ta bonne fille pis laisse-nous travailler.
– Jamais! Mon mari avait laissé la moitié à mes filles, astie de sale!
– Wô, on reste polie!
– Parce que c’est poli, d’abord, de rentrer chez le monde en gros colons pis de partir avec leur stock?
– Bon ben, si c’est de même, m’a t’apprendre, moé, à défier l’empereur!

Il la fit alors déshabiller pis fouetter, une punition qui était normalement réservée aux esclaves. Le message était clair, mettons. Pis histoire de beurrer encore plus épais, ses hommes violèrent les deux filles de Boudicca, qui étaient encore yinque des ados.

Après ça, Catus Decianus captura tous les hommes qui étaient parents avec Prasutagos et partit avec dans l’idée de les vendre comme esclaves, pour éviter qu’un d’eux-autres s’essaye à revendiquer le trône. Finalement, il fit le tour des domaines du reste des nobles icènes, ramassant toute ce qui lui tentait comme si y’était au IKEA.

Quand il finit par sacrer son camp, le royaume était complètement viré à l’envers, pis ses habitants aussi. Boudicca, le dos en sang pis ses filles collées après elle, était en tabarnak. En‑dedans d’elle, un motton de rage brûlait plus fort que 10 000 feux de forêt sur la Côte-Nord. C’était pas des larmes qui sortaient de ses yeux noirs de fureur comme un ciel à la veille de fendre, c’était de la stime. Pis là, elle fit une promesse :

« M’a m’venger, ciboire! M’a m’venger! Andraste, déesse d’la victoire, j’te l’jure s’a tête de mes filles! Drette comme chu là, j’te promets qu’m’a les faire payer, c’tes câlice de chiens sales. M’a toute crisser à terre. M’a toute brûler. M’a les écorcher vifs pis les embrocher un par un comme des astie de porcs! »

Les Romains étaient aussi ben d’attacher leur tuque avec d’la broche pis du tape gris.


Pas longtemps après, Caius Suetonius Paulinus, général et gouverneur de la Bretagne, arriva sur l’île. Y’était pas au courant pantoute de ce que Catus Decianus avait fait aux Iceni, mais quand il l’apprit, il était pas trop de bonne humeur :

– Ben voyons, Catus, qu’est-ce qui t’a pogné là? Tu y es allé ben que trop fort. Ça va nous r’venir dans’ face!
– J’avais l’doua, répondit Catus. Le testament de Prasutagos était pas légal. J’ai jusse pris ce qui était à l’empereur.
– Ouin. Refais-moé pu d’affaires de même sans m’en parler, ok?

Quessé que vous vouliez qu’y fasse? Y’était toujours ben pas pour s’excuser aux Iceni. Aux yeux de la loi, y’étaient juste des esclaves, pis lui, y’était ben que trop fier pour s’abaisser devant eux‑autres.

Pas longtemps après, il dut partir avec ses troupes pour aller serrer les ouïes aux druides de l’île de Mona, qui commençaient à faire du trouble en accueillant des rebelles pis des réfugiés, pis tant qu’à faire, mettre la hache dans leurs boisés sacrés où y faisaient leurs rituels bizarres.

C’était drette le bon moment pour Boudicca.

Faique elle rassembla les Iceni et convainquit les Trinovantes, un autre peuple breton qui commençait aussi à être à boutte des abus des Romains, d’embarquer avec elle. Boudicca se présenta alors devant eux-autres, une lance dans la main pour l’effet dramatique. Puis, avec le genre de voix qui te pogne par le collet pis te force à l’écouter, elle dit :

« Vous avez connu la liberté, pis vous avez connu l’esclavage. Vous-autres comme moé, vous avez cru les promesses des Romains, pis vous vous êtes fait fourrer. Icitte, c’est chez nous, pis à c’t’heure, on s’doit l’cul en impôts à des étrangers qui nous ont pris toute c’qu’on avait. Messemble qu’on serait mieux morts que de continuer à payer!

Mais, m’a être honnête avec vous‑autres : toute c’te marde-là, c’est de notre faute. Wô oui, de notre faute! Parce qu’on les a laissés faire. Parce qu’on a laissé les Romains débarquer icitte pis nous piler d’ssus.

Là, c’est temps de mettre nos culottes pendant qu’on s’rappelle encore c’est quoi, être libres! Parce que nos enfants, eux-autres, y risquent de l’oublier. Y vont faire quoi, eux-autres qui sont nés libres, pis qu’y’ont été élevés dans l’esclavage?

Si j’vous dis toute ça, c’est pas pour vous crinquer contre les Romains ni pour vous donner peur pour l’avenir – ça, c’est déjà fait. C’est pour vous féliciter d’avoir fait la bonne affaire en venant icitte.

Ayez pas peur des Romains. C’est juste des pissous! Y se cachent en-arrière de leurs armures pis de leurs palissades. Nous-autres, on est ben correct avec juste nos tentes pis nos boucliers. Y toffent pas la faim, la soif, le frette pis la chaleur comme nous-autres. Deux minutes pas de pain pis pas de vin, pis y capotent. Nous-autres, on peut se contenter de l’herbe pis de l’eau des ruisseaux. On connaît le terrain par cœur, pis eux-autres y n’ont peur. Faique allons-y : on va leur montrer qu’y sont yinque des lièvres qui essayent de bosser des loups! »

Tout le monde qui l’avaient entendue se mirent à crier comme des perdus, les armes en l’air. Et l’armée de Boudicca, forte de 120 000 Bretons, se mit en marche.

Là, j’vous ferai pas de cachettes. Ce qui se passa ensuite, c’était pas l’fun. D’ailleurs, âmes sensibles s’abstenir – ça va être roffe pas mal.

Boudicca et sa gang commencèrent par attaquer Colchester, la capitale provinciale, une belle ville avec des théâtres, des temples et des fontaines… mais pas de murs. Les Romains en avaient pas mis, car ils voulaient une ville ouverte, où les barbares locaux pourraient entrer comme ils voulaient et voir comment c’était don beau pis civilisé, l’empire romain. Pis ce jour-là, ça se retourna contre eux-autres.

Les guerriers de Boudicca sacrèrent le feu, pillèrent, rasèrent les bâtisses au solage. Ils tuèrent sans discrimination – hommes, femmes, enfants, Romains pis non-Romains. Ceux qui eurent le malheur de se faire pogner vivants se firent torturer – crucifixion, coupage de bouttes, empalement, tout était permis dans ce free-for-all apocalyptique. Pendant des jours après les Bretons se lâchèrent lousse, et swigne la bacaisse dans l’fond de la boîte à bois, une orgie dans tous les sens du terme sur fond de sang, de flammes pis de cris d’agonie.

Un m’ment’né, y resta pu rien ni personne, juste des tas de cendres. Faique Boudicca tourna les yeux vers Londres.


Quand Paulinus, qui avait encore quelques druides sur le feu, fut averti du désastre, Boudicca avait déjà fait d’la viande hachée avec deux vagues de renforts venus sauver les habitants de Colchester.

« Simonac, j’y avais dit, à Catus, que ça allait nous r’venir dans’ face! »

Il ramassa donc ses légions et repartit au plus sacrant pour essayer d’arrêter la horde de Bretons en furie. Il fit aussi envoyer des messages aux autres garnisons romaines pour avoir des renforts. (Quant à Catus, l’innocent qui avait starté toute ça, il eut la chienne et prit le premier bateau du bord pour se rendre en Gaule.)

À son arrivée à Londres, Paulinus prit pas grand temps pour se rendre compte qu’il avait vraiment pas assez de soldats pour défendre la ville. Comme y savait que les rebelles bretons allaient arriver ben avant ses renforts, il décida de les laisser décrisser la ville pis d’aller attendre après les autres légions. Les habitants de la ville le supplièrent à quatre pattes de rester, mais l’idée de Paulinus était faite : c’était ben plate pour Londres, mais s’ils essayaient d’affronter l’ennemi tusuite, ses hommes et lui allaient certainement finir en méchoui, tandis que s’ils prenaient leur temps, ils pourraient ramasser assez de monde pour effoirer les rebelles.


Boudicca, elle était loin d’être tannée du tuage : son motton de rage chauffait encore aussi fort que le poêle quand y fait -34°C, pis elle arrêterait pas le massacre tant qu’il resterait des Romains sur son île – d’la marde pour les autres qui se mettraient dans son chemin.

Faique c’est avec une armée quasiment deux fois plus grosse – un party de même, c’est sûr que ça attire les woireux – que la reine des Iceni arriva à Londres. Comme à Colchester, les Bretons rasèrent toute sans faire de prisonniers. Ensuite, ce fut au tour de Saint Albans, la dernière des trois grandes colonies romaines, de passer au cash.

Ils avaient déjà tué autour de 70 000 personnes, pis il leur restait juste une cible à détruire pour être débarrassés : Paulinus et son armée.  

Le gouverneur romain continuait de se sauver toujours plus loin, suivi par les réfugiés de Londres et de Saint Albans, mais ses renforts s’étaient toujours pas pointé la face. Il dut se faire une raison : personne viendrait l’aider, et y’allait devoir régler ça tout seul, icitte pis maintenant.

(Ce qu’il savait pas, c’est que le major Poenius Postumus, qui devait lui apporter la majeure partie des renforts, avait reçu son message, mais comme y’avait entendu parler des horreurs épouvantables commises par les Bretons, il avait jeté ses ordres dans le feu en sifflant comme un épais.)

Comme les Bretons étaient au moins 12 fois plus nombreux que ses troupes, Paulinus choisit un spot avantageux pour lui, un passage étroit entre deux buttons qui débouchait sur une plaine, pis attendit l’ennemi.


Le lendemain matin, Boudicca et ses guerriers arrivèrent. Ils étaient comme des queues de veau, pressés de sauter dans le tas. Quand ils virent les Romains se placer en avant d’eux‑autres entre les deux buttons, ils partirent à rire :

« Heille, t’as-tu vu ça? Sont don ben pas beaucoup! On va les ramasser sur un astie de temps! »

En arrière des combattants, les femmes bretonnes, qui avaient suivi leurs hommes dans leur virée sanglante, avaient placé leurs waguines bourrées de stock volé en demi-cercle pis s’étaient installées comme pour regarder la balle-molle un dimanche après-midi – manquait pu yinque le pop‑corn.

Pis là, Boudicca arriva, montée sur un chariot de guerre avec ses deux filles. Tout le monde se ferma la gueule pour l’écouter :

« Aujourd’hui, chus pas une reine : chus une de vous-autres, pis je suis venue retrouver ma liberté, venger mon dos pleumé par le fouet pis faire payer les Romains pour avoir volé la chasteté de mes filles. Les dieux sont du bord de la vengeance des justes! Dans cette bataille-là, c’est vaincre ou mourir! En tout cas, c’est ce que moé j’ai décidé en tant que femme. Vous-autres, les hommes, vous pouvez choisir de vivre pis de devenir esclaves, si ça vous tente. »

Y’eut une véritable explosion de cris de guerre, de hurlements déchaînés pis de chansons de victoire. Pis les Bretons se garrochèrent sur les Romains, les chariots en premier, suivis des guerriers à pied.

Ça devait être crissement épeurant de se faire foncer dessus par une marée de barbares douze fois plus nombreux, mais les Romains restèrent ben calmes et suivirent le plan de Paulinus à la perfection. Ils formèrent des triangles qui brisaient les lignes ennemies comme des vraies moissonneuses-batteuses à monde, une tactique que les forces de Boudicca avaient jamais vue pis qu’y savaient pas pantoute comment contrer. Après ça, la cavalerie romaine s’en alla sur les côtés pour pogner les Bretons en tenaille pis les forcer à se taponner toute ensemble au milieu.

Autant les Romains étaient disciplinés, autant les Bretons étaient juste un tas d’enragés pas coordonnés qui s’étaient ramassés ensemble contre un ennemi commun.

Ben vite, ça se mit à fuir de tous bords tous côtés dans la panique totale; des milliers de guerriers bretons finirent effoirés sous les pieds de leurs propres compatriotes. En plus, en arrière, y’avait encore la rangée de waguines qui bloquait la retraite comme une clôture d’enclos à bestiaux.

Les Bretons étaient pognés. Ils furent massacrés par milliers, pis en moins de deux heures, la rébellion de Boudicca était finie. Les Iceni pis les Trinovantes connurent pus jamais la liberté. Quant à Boudicca, on dit qu’elle se sauva aussi et que, incapable de digérer la défaite, elle se suicida avec du poison.

Aujourd’hui, y’a une statue de Boudicca au beau milieu de Londres – tsé, la ville qu’elle a crissée à terre comme un bulldozer? Faut quand même y donner ce qui lui revient : si elle avait vaincu Paulinus, les Romains auraient carrément perdu l’île de Bretagne, pis elle aurait changé le cours de l’histoire.

Faique c’était qui, en vrai, la reine des Iceni? La première héroïne anglaise, une icône féministe avant le temps, ou bedon un monstre assoiffé de sang? C’est ça qui est plate, avec l’histoire : y’a jamais rien de toute noir ni de toute blanc.


*On va clarifier ça drette-là : dans ce temps-là, ce qu’on appelait la Bretagne, c’était la Grande‑Bretagne d’à c’t’heure (l’île où y’a l’Angleterre, l’Écosse et le pays de Galles). La Bretagne en France, c’était la Gaule. Pis les Bretons, c’étaient les habitants celtes de l’île de Bretagne.


**Fonctionnaire chargé de gérer une province.


Source principale : Dion Cassius, Histoire romaine, traduction anglaise de la Loeb Classical Library edition, 1925 .
http://penelope.uchicago.edu/Thayer/E/Roman/Texts/Cassius_Dio/62*.html

La « grande affaire » du roi Henry VIII

Henry VIII et Anne Boleyn.

N’écoutant que sa brimballe, Henry, dès lors, eut juste une idée en tête : se débarrasser de sa femme Catherine. Y’avait juste un tout petit problème : le pape.

En 1525, le roi Henry VIII d’Angleterre commençait à capoter : avec sa femme, la reine Catherine d’Aragon, il avait eu une fille, Mary, mais aucun gars. Et comme la reine rajeunissait pas (à 40 ans, elle avait cinq ans de plus que son mari), ça commençait à presser pour avoir un héritier mâle.

(En fait, c’est Henry qui avait le piton collé sur un gars. En Angleterre, les femmes avaient le droit d’hériter de la couronne. Mais comme la dernière fois, 400 ans avant, ça avait fait une guerre civile, ça lui tentait pas trop que ça arrive.)

« Quessé je pourrais ben faire? se demandait le roi. Hm. Je pourrais reconnaître un de mes bâtards comme fils légitime. Ou, je pourrais marier ma fille Mary au plus crisse, pour qu’a me fasse un petit‑fils. Ou bedon… Je pourrais flusher Catherine pis en marier une plus jeune? »

Pour Henry, qui était encore tout fringant, rougeaud et dans la fleur de l’âge, c’était de loin la solution la plus tentante. Surtout que, depuis une secousse, il y avait une petite brune qui lui faisait un gros effet : Anne Boleyn, une belle fille sophistiquée, éduquée en France, avec ben des talents pis de la jarnigoine.

Henry s’était déjà tapé plusieurs fois sa sœur, Mary Boleyn. Mais Anne, elle, voyait plus grand qu’être juste la maîtresse du roi. Quand Henry commença à lui faire des avances, Anne répondit :

« Ah, Votre Majesté, vous êtes ben fin pis je suis ben flattée, mais si vous voulez du nanane, va falloir m’épouser. »

N’écoutant que sa brimballe, Henry, dès lors, eut juste une idée en tête : se débarrasser de sa femme Catherine. Y’avait juste un tout petit problème : le pape.

Parce que, ouais, dans ce temps-là, le pape avait toujours le nez fourré dans les affaires des familles royales, jusque dans leur chambre à coucher. S’il décidait de pas t’accorder une dispense pour marier ta cousine, ben tu mariais pas ta cousine. Pis s’il décidait qu’il te laissait pas divorcer, ben tu divorçais pas.

Au début, Henry essaya de jouer dans les règles. Il demanda au pape Clément VII d’annuler son mariage avec Catherine. Son prétexte? C’était la femme de son frère – elle avait d’abord marié le frère aîné d’Henry, Arthur, mais il était mort même pas six mois après.

« Monsieur le Pape, là, vous rendez-vous compte? chigna le roi. Le Lévitique* dit que c’est pas correct de marier la femme de son frère!  Ça fait 14 ans que je vis dans le péché pis je me sens tout sale! Ark! L’ancien pape aurait jamais dû laisser faire ça! Annulez-moi ça tusuite, ce mariage‑là! »

Clément VII fut pas convaincu :

« Ben essayé, mon grand, mais fais pas ton hypocrite : la femme de ton frère, elle a fait ben ton affaire pendant tout ce temps‑là, pis là, ça serait pu correct? Je le sais ben que tu veux juste t’enfiler une petite jeune, faique sèche. »

Henry convainquit quand même le pape de lui envoyer un représentant et d’établir un tribunal ecclésiastique en Angleterre, où la pauvre Catherine d’Aragon, pour se défendre, dut dire devant tout le monde qu’elle avait jamais couché avec son premier mari, qu’elle était la femme légitime d’Henry, pis que personne allait la tasser pour la mettre dans un couvent.

Après, le représentant du pape repartit à Rome, en disant :

« Bon, ben j’ai tout ce qui me faut! Je vous rappelle quand j’ai du nouveau. »

Mais, il n’y eut jamais de nouveau. L’affaire tomba dans les limbes, pis le pape rappela jamais.

Rendu là, Henry attendait depuis sept ans et était sur le bord d’exploser. Il prit alors une décision qui allait changer la face de l’Angleterre pour toujours :

« Ah, pis, le pape peut ben manger de la marde : je pars une nouvelle religion, ça va être moi le grand boss, pis personne va m’empêcher de divorcer de ma femme pis de marier Anne. »

C’était le début de la religion anglicane.

L’anglicanisme pour les nuls

L’anglicanisme est une religion protestante dont le chef est pas le pape, mais le souverain d’Angleterre (faique de nos jours, c’est Elizabeth II).

Si c’est Henry VIII qui a coupé les ponts avec l’Église catholique (à coups de hache forgée dans
le feu de sa libido infernale), c’est sa fille Élizabeth qui a fondé la religion anglicane pour de bon.

Entre autres, dans l’anglicanisme, il y a juste deux sacrements (le baptême et la cène), les pasteurs peuvent se marier, on croit pas que les hosties, c’est vraiment des bouttes de Jésus, pis ya juste la foi, et non les bonnes œuvres, qui fait mériter le ciel.

Drette là, Henry crissa la pauvre Catherine dehors et donna ses appartements à sa nouvelle flamme. Le couple se maria en douce, et Anne tomba vite enceinte. Le p’tit gars tant attendu?

C’est ben de valeur, mais : non. Le 7 septembre 1533, c’est une petite fille qui est née. Henry était loin de giguer de bonheur, mais quand même, il nomma la petite Elizabeth en l’honneur de sa mère et se dit qu’Anne était encore jeune pis qu’elle pourrait se reprendre.

Or, Henry commençait déjà à déchanter. Pour lui, la jarnigoine chez une femme, c’était ben l’fun dans le temps des chuchotements pis des frissons dans les coins sombres, mais là, les opinions de sa nouvelle femme sur à peu-près toute, de la politique à la religion, commençaient à lui taper sur les nerfs. Anne avait la mèche courte en plus, faique ils passaient leur temps à s’astiner.

À boutte de voir Henry courailler partout, Anne piquait une crise épouvantable à chaque nouvelle maîtresse (crache en l’air, r’tombe su’l nez?). Pis elle était baveuse : un m’ment’nné, elle alla même jusqu’à insinuer que, si elle avait pas encore eu de fils, c’est parce qu’Henry manquait de vigueur en dessous des couvertes. À part de ça, avec sa tendance à péter plus haut que le trou et son influence de plus en plus grande à la cour, elle avait commencé à se faire des ennemis, qui auraient préféré une reine potiche.

Comme si ça allait pas assez mal de même, Anne fit deux fausses couches. Là, Henry en eut son tas; pour lui, c’était comme une trahison. Il commença même à s’informer auprès de ses plus proches conseillers, voir si c’était possible de domper Anne sans être obligé de revenir avec Catherine.

Le dernier clou dans le cercueil arriva sous la forme d’une jolie blonde appelée Jane Seymour. Nunuche et inoffensive, elle était beaucoup plus facile à vivre qu’Anne. Astheure qu’Henry avait un plan B, c’était juste une question de temps avant qu’Anne prenne le bord. Pas longtemps après, on commença à s’organiser pour la faire disparaître (qui était vraiment en arrière de tout ça? On le saura jamais).

À la fin d’avril 1536, cinq hommes, dont Georges, le frère d’Anne, furent arrêtés et accusés d’avoir couché avec la reine. Le 2 mai, Anne fut arrêtée à son tour et accusée d’adultère, d’inceste, de haute trahison, de sorcellerie, extra bacon, un chausson avec ça?   

Même si les preuves contre eux-autres étaient minces comme de la peau de pet, Anne et les cinq hommes furent condamnés à mort. La sentence pour les femmes déclarées coupables de trahison était le bûcher, mais on fit une exception pour Anne : elle allait être SEULEMENT décapitée, pis pas par n’importe quel gros bourreau poilu avec une hache, mais par un expert français réputé pour faire des belles coupures propres avec une épée (y’a pas de sot métier, hein). Anne aurait d’ailleurs déclaré :

« J’ai entendu dire que le bourreau était ben bon, pis j’ai un p’tit cou de poulet, haha. »

Anne fut exécutée le 15 mai 1536. Drette le lendemain, Henry se fiançait à Jane Seymour. Pis dix jours après, ils étaient mariés. 

Maudit écœurant.
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*C’est un livre de la Bible.

Guillaume le Conquérant – partie 3

Édouard le Confesseur mourut le 5 janvier 1066. Harold Godwinson ne perdit pas une seconde : il se fit couronner drette là par le Witan, l’assemblée des nobles d’Angleterre, affirmant qu’Édouard, sur son lit de mort, serait sorti de son coma et lui aurait dit : « Prends soin de ma femme… Pis de mon royaume… Argh! », avec la petite main qui tombe molle et tout et tout.

De l’autre côté de la Manche, Guillaume, quand il apprit cela, péta une coche. « Heille, chose! cria-t-il depuis la Normandie. T’as pas d’affaire sur le trône, parce que tu m’as juré fidélité! » L’affaire, c’est qu’un an avant la mort d’Édouard le Confesseur, Harold Godwinson, poussé par une tempête, s’échoua sur les côtes du Ponthieu, au nord de la Normandie. Pas mardeux, il se fit capturer par le comte Guy 1er. Or, Guillaume s’organisa pour le faire libérer, mais ce n’était pas par bonté d’âme : un fou dans n’poche! Il n’allait pas manquer une occasion de même! La suite est pas trop claire, mais Guillaume en aurait profité pour faire jurer à son rival, sur des reliques sacrées – on rit pu – de pas se mettre dans ses jambes quand il réclamerait le trône d’Angleterre.

Donc, quand il se le fit remettre sur le nez, Harold répliqua : « C’était pas un vrai serment! Les reliques étaient cachées en-dessous d’une boîte pis je les ai pas vues, faique ça compte pas! » Harold s’étant parjuré à ses yeux, Guillaume répondit : « Ah, c’est de même? Attache ta tuque, mon estie, je m’en viens t’en crisser une! »Or, Harold avait la broue dans le toupet : Harald Hardrada, roi de Norvège, venait de débarquer pour envahir l’Angleterre. Harold rassembla donc son armée et marcha vers le nord tellement vite qu’il pogna les Norvégiens les culottes à terre et les décâlissa à la bataille de Stamford Bridge.

Mais là, Guillaume s’en venait, lui, de l’autre bord! Les cadavres de Norvégiens étaient même pas encore frettes qu’il débarqua en sol anglais, forçant Harold à clancher aussitôt vers le sud pour l’affronter. La légendaire bataille d’Hastings allait commencer.

Dès le matin, les troupes étaient face à face, avec environ 7 000 hommes de chaque bord. Au début, ça regardait mal pour Guillaume : il essaya de bombarder l’armée anglaise de flèches, mais ça ne marcha pas fort fort vu que les Anglais étaient sur le dessus d’une butte. La cavalerie et l’infanterie normandes essayèrent alors d’ouvrir une brèche dans les forces anglaises.

Ce fut le chiard total : les Normands reçurent une volée de javelots, de haches pis même de roches. Et là, la rumeur se mit à courir que Guillaume avait trépassé. Une partie de l’armée normande se mit à fuir, et une gang d’Anglais partirent après eux‑autres. Faique Guillaume ôta son casque et chevaucha au travers de ses gars en gueulant : « A’rgardez! Chu vivant! Aweille! » Les Normands, crinqués par la vue de leur duc en vie, contre-attaquèrent et démolirent les poursuivants.

Tout le monde s’arrêta pour dîner, pis là Guillaume eut une idée : « Heille! Et si on faisait comme à matin… Mais par exprès? » Quand la bataille reprit, il ordonna à ses soldats de faire semblant de se sauver, pour que les Anglais brisent leurs rangs et se lancent à leur poursuite, tout croches et désorganisés. La ruse marcha sur un moyen temps : à la fin de la journée, Harold était raide mort sur le champ de bataille avec une flèche dans l’œil tandis que Guillaume virait la brosse avec ses gars.

Pas longtemps après, Guillaume marcha triomphant sur Londres et réclama son trône, refaisant pour toujours la face de l’Angleterre.